Catégories
FESTIVAL D'AVIGNON

Festival d’Avignon: merci…

Le festival «In» d’Avignon est terminé. Avant mon bilan global qui sera mis en ligne début septembre, quelques remerciements…

Merci à Vincent Macaigne de m’avoir fait plonger dans son théâtre de terre, de sang et de feu. Ma révélation.

Merci à Anne Teresa de Keersmaeker pour m’avoir offert à 4h30 du matin une chorégraphie de l’aube et de l’espoir.

Merci à Arthur Nauzyciel pour son théâtre d’une humanité désespérée où Laurent Poitrenaux nous a sidérés par son jeu magnifique d’acteur.

Merci à Romeo Castellucci de m’avoir fait vivre une expérience théâtrale d’où j’ai trouvé le chemin.

Merci à Boris Charmatz d’avoir transformé la Cour d’Honneur en aire de (ré)création.

Merci à Tino Sehgal d’avoir inventé un théâtre des idées tendre, malin et subversif.

Merci à Katie Mitchell et Léo Warner d’avoir crée le cinéma théâtral d’un amour à mort.

Merci à Angélica Liddell d’avoir révisé mon alphabet pour y presser les raisins de la colère.

Merci à Jalila Baccar et Fadhel Jaïbi pour leur danse théâtrale révolutionnaire.

Merci à Kelly Copper et Pavol Liska pour la force de leur quotidien réenchanté.

Merci à Thierry Thieu Niang pour son printemps rajeunissant en plein été.

Merci à cette spectatrice pour sa volonté d’en découdre avec «Violet» de Meg Stuart.

Merci à Xavier Le Roy d’avoir fait du noir la couleur de la communication.

Merci à François Berreur pour Laurent Poitrenaux en Jean-Luc Lagarce.

Merci à Jérôme Bel. Pour tout.

Merci à William Forsythe pour ses objets chorégraphiques posés dans mon théâtre des idées.

Merci à Anne-Karine Lescop d’avoir ouvert le Festival avec un petit projet qui voit si grand.

Merci à Médéric Collignon d’être un si beau cornettiste dansant.

Merci au Festival d’Avignon d’être l’un des rares lieux où vivre pour le théâtre est une pure folie.

Pascal Bély,  Le Tadorne

Catégories
FESTIVAL D'AVIGNON

Festival d’Avignon : finalement, c’est la bonne direction.

C’est une voix qui résonne dans la salle Benoit XII : “je vous remercie de mettre le spectateur en état de risque”. Cette belle phrase est adressée à Hortense Archambault et Vincent Baudriller, actuels directeurs du Festival d’Avignon, dont le mandat se termine bientôt. À ce moment précis, nous sommes quelques-uns à ressentir ce qu’il nous est arrivé l’été dernier. Ces deux-là nous propulsent à chaque édition dans le risque et l’instabilité. Ils «accompagnent» le travail de certains spectateurs (dont votre serviteur) à se confronter aux formes contemporaines de l’art, au langage théâtral, loin du clivage entre texte et corps. Le public a beaucoup progressé si l’on se réfère au succès rencontré par les chorégraphes et les performeurs de l’édition 2010. Depuis 2004 (date de l’arrivée du binôme actuel), Avignon est devenu “le” festival de création contemporaine comme se plaît à le rappeler un spectateur lorsqu’il fait référence au dernier spectacle de Warlikowski chahuté par le public parisien (« ça, c’est un spectacle pour Avignon !»).

Mais ce soir, pour cette soirée bilan, une partie du public a besoin de (re)jouer sa régression infantile. Il y a toujours ceux qui regrettent Jean Vilar (Vincent Baudriller a raison quand il dit:«vous ne retrouverez jamais une mise en scène de Jean Vilar», « le théâtre est toujours un art du présent »). Il est donc beaucoup question de « Richard II », joué dans la Cour d’Honneur. Soit pour vanter la traduction de Frédéric Boyer (une spectatrice nous fait un joli cours à ce sujet précisant que «traduire, c’est aussi créer»), soit pour dénoncer l’ennui de la mise en scène. Mais derrière ce reproche, toujours le même regret : Vilar est mort ! Jusqu’à la sentence d’un spectateur : «vous ne savez pas doser entre théâtres classique et contemporain !».
Puis vient toujours le moment d’opposer le « in » et le « Off » (Hortense Archambault a raison quand elle dit : «ce n’est pas le même projet artistique»). ll y a aussi ceux qui regrettent le froid dans la Cour ou qu’il n’y ait pas de sanisettes dans les rues. Certains spectateurs s’inquiètent même de la proportion d’Avignonnais dans le public. D’année en année, ce type de rencontre rejoue sa dramaturgie: celle d’une France qui regarde son passé, admire ses cloisons et regrette sa puissance perdue!
Loin de cette musique habituelle,  Hortense et Vincent (comme on dit ici; seul le Ministre de la Culture osa la formule sur France Inter, « Hortense et son ami »)  justifient la présence de Christoph Marthaler dans la Cour. Ils ont voulu le faire entrer dans l’histoire du festival. L’Histoire tranchera.
Plus tard, ils reçoivent des applaudissements chaleureux pour avoir organisé le bal du 14 juillet. Que cela puisse les encourager à poursuivre ce travail de réchauffement des relations entre spectateurs ! 
Puis vient le moment où je questionne leur projet de développement. Ils nous expliquent le projet de la Fabrique, futur lieu de répétition et de création qui devrait sortir de terre en 2013. On rêve avec eux d’un développement régional de la création autour d’Avignon qui rayonnerait  au-delà des frontières. J’imagine avec eux des espaces d’accompagnement du public pour en finir avec cette idée qu’il faudrait être formé pour aller au théâtre.
Je rêve alors d’une région PACA ouverte à la création contemporaine, d’une France accueillante envers les créateurs étrangers.
D’une France qui ne se laisserait pas séduire par le divertissement facile ou s’enfermer dans le théâtre patrimonial.
On se prend à rêver d’emprunter cette voie.
Mais finalement, pourquoi devrait-on changer de direction ?

Pascal Bély – www.festivalier.net.