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Christine Angot-Mathilde Monnier: le beau souvenir d’Avignon 2005.

Il aura donc fallu en passer par là…Subir Rambert, Vienne, Decuvellerie pour enfin comprendre le projet global de la Direction du Festival. Cette déconstruction que vit le public (il perd ses repères habituels) est nécessaire pour l’aider à passer vers d’autres formes artistiques, métaphores du nouveau monde à construire. Nous sommes effectivement à la fin d’une époque (le monde binaire) pour entrer dans la globalisation (les réseaux). Le spectacle vivant pouvait-il rester à l’écart de cette mutation ? Cette édition restera sans aucun doute un tournant dans la vie agitée du Festival d’Avignon.
Alors à force de déconstruction, j’étais prêt pour accueillir à 19h la proposition de Christine Angot et de Mathilde Monnier, «La place du singe». Pour la première fois dans ma courte vie de spectateur, j’ai assisté à la magnifique articulation entre la Danse, la Littérature et le Théâtre.

Un texte puissant d’Angot sur la bourgeoisie qui fait lien entre elles, Monnier qui danse les non-dits (nombreux dans ce milieu), une scénographe, Annie Tolleter, qui métaphorise par des objets (un drapeau français, une estrade,une table) le contexte du charme si discret de la bourgeoisie. Tout au long du spectacle, je suis fasciné par la justesse du propos, la sincérité des acteurs (pour la première fois dans ce festival, j’entends un « je » engageant) et la puissance de Monnier qui utilise son corps comme défouloir d’une souffrance trop longtemps enfouie.
Le public est debout, ovationne ce trio. Emu par ce lien entre elles et nous, entre le Festival et son public, entre les arts et le monde…
Une (re)construction.
Pascal Bély- Le Tadorne.
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Bilan du Festival d’Avignon 2005.

Le 58ème festival symbolisait la transition : de la crise de 2003 à la reconquête du public ; de Faivre d’Arcier au duo Archambault – Baudriller associé à Thomas Ostermeier ; de la France à l’Europe. Ce fut une incontestable réussite, marqué par le sceau du lien : avec le public, les artistes, les techniciens et les critiques. Je me souviens avoir quitté le Festival heureux, apaisé, avec de beaux moments de théâtre en tête.

Il en est tout autrement pour la 59ème édition, marquée par le changement. Un processus s’est donc joué pour que je finisse épuisé à la fin du mois de juillet. Pour la première fois, les créations m’ont questionnées personnellement sans qu’il me soit toujours possible d’échanger sur le terrain de l’intime avec d’autres spectateurs. Ce questionnement n’a jamais été ponctuel mais continu, sans véritable pause réparatrice. La réussite de cette édition est d’avoir provoqué un changement de positionnement: du consommateur culturel, je suis devenu « sujet » dans un lien plus intime avec les créateurs

Les amis.

 

 

 

 

 

 

 

Le lien fut très fort avec Olivier Py (« Les vainqueurs »), Jean François SivadierLa mort de Danton » («  ; « La vie de Galilée »), Jan Fabre (« L’empereur de la perte ») et Arne Sierens (« Marie éternelle consolation »). J’etais en terrain connu (le théâtre) et pour chacun d’entre eux, c’etait un lien d’amitié, de reconnaissance, presque d’empathie avec ces metteurs en scène talentueux et quatre acteurs magnifiques : Christophe Maltot, Nicolas Bouchaud, Dirk Roofthooft et Johan Heldenbergh. Ce fut quatre moments de théâtre où tous mes sens etaient en éveil, éblouis par tant de talent, comme un enfant qui découvrait la première fois un numéro de cirque.

Le choc .

Il en fut tout autrement avec Thomas Ostermeier (« Aneantis »), Roméo Castellucci (« B.≠03 Berlin » ; « B.≠04 Bruxelles »), William Forsythe You made me a monster ») et Jean Lambert-Wild (« My story is not a loft »). Dans ces quatre situations, point d’empathie mais un choc émotionnel. Entre les images métaphoriques de Castellucci sur les forces du mal, la parabole de la guerre en Yougoslavie chez Ostermeier, l’évocation du cancer chez Forsythe,  et le sadisme chez Lambert – Wild il y avait de quoi se sentir en souffrance. Certains  spectateurs avaient du mal à s’exprimer quand d’autres refuser de voir certaines évidences. Ces metteurs en scène ont quelque part changé mon regard au monde, m’ont aidé à repérer des processus universels et à travailler mes résonances.
Les liens d’amour.

Avec Marina Abramovic (« The biography Remix » et « Brutal Education »), j’ose évoquer le lien d’amour. Je ne connaissais pas cette artiste Serbe, encore moins ses performances et son histoire personnelle. Trés ému, j’ai trouvé chez cette artiste une force créative et vitale incroyable. Cette rencontre sera mémorable. Et puis il y avait Mathilde Monnier. J’aime cette chorégraphe intimiste, exigeante et  intelligente. Je l’avais rencontré au Théâtre de Cavaillon où, après le spectacle (« Publique »),  elle nous avez parlé à mots couverts de sa future création (« Frère et sœur »). J’etais persuadé que la Cour d’Honneur etait faite pour elle. Inutile de revenir sur son ratage. J’ai retrouvé ce lien lors de « La place du singe » avec Christine Angot. Je ressentais la souffrance de Monnier, la détermination d’Angot. Je les remercie de m’avoir aidé à voir la bourgeoisie autrement, loin des clichés véhiculés par certains idéologues. Ce fut un grand moment où la littérature a rencontrée la danse, où la pluridisciplinarité tant voulue par la Direction du Festival a merveilleusement fonctionné.

La pluridisciplinarité !

Ce lien entre disciplines n’a pas toujours été évident à l’image du spectacle deWim Vandekeybus (« Puur ») où la vidéo a alourdie une chorégraphie déjà chargée en symboles. Je ne parle même pas de Jan Fabre (« L’histoire des larmes ») qui n’arrive même plus à relier le théâtre, la danse, la performance et les arts plastiques…Quand à Jan Decorte (« Dieu et les esprits vivants »), entre sa poésie métaphysique, ses chants et la danse d’Anne Teresa de Keersmaeker, il a bien fallut chercher la cohérence et le lien…Peine perdue ! Comme d’ailleurs avec Lambert – Wild (« Mue, première Mélopée») qui est allé nous perdre au Château de Saumane.

La vidéo a parfois produit de beaux effets  comme chez Jean-François PeyretLe cas de Sophie K ») et Louis Castel (« Federman’s ») mais la maîtrise parfaite de l’articulation entre le théâtre et l’outil vidéo s’est parfois faite au détriment de l’émotion. Au contraire de Joseph Nadj qui avec « Last Landscape » a une nouvelle fois démontré que la danse, la vidéo et le Jazz, faisaient merveille lorsqu’ils étaient porteur de sens.

Mélange des genres que maîtrise toujours à merveille Jan LauwersNeedlapb 10 ») même si la magie de « La chambre d’Isabella » n’a pas pu se reproduire. Le concept même du Needlapb en a dérouté plus d’un (expérimenter des fragments de création sur le public !).

Dans tous les cas, la pluridisciplinarité m’a obligée à dépasser mes résistances, à être acteur du lien. Où est donc l’imposture que denoncait une certaine presse…

Les imposteurs.

Pascal Rambert (« After / Before ») a focalisé sur ce sujet toutes les aigreurs. Il y avait de quoi ! Je continue à penser que cette création a fait basculer le festival vers la crise! Toujours dans cette catégorie, citons : Jacques Décuvellerie (« Anathème »), Jean –Michel Bruyère (« L’insulte faite au paysage »), et Gisèle Vienne« Une belle enfant blonde » et « I Apologize »). Ces quatre auteurs ont manipulés le public, l’ont disqualifié, en jouant avec les limites de l’acceptable (les poupées et le sado masochisme chez Vienne ; des êtres humains sujet d’exposition chez Bruyère).  Etait-il normal que je me sente si nul à la fin de ces spectacles ?

Concernant le sentiment de manipulation, mention toute spéciale à la Direction du Festival. En programmant Jean-Louis Trintignant (“Apollinaire »), elle  interdisait toute critique objective d’une prestation quelque peu ennuyeuse et sans autre intérêt artistique que de calmer les esprits.

La palme !

L’édition 2005 laissera trois bijoux : “Les vainqueurs” d’Olivier Py, “Soit le puits etait profond, soit ils tombaient très lentement, car ils eurent le temps de regarder tout autour » de Christian Rizzo et  « Kroum » de Krzysztof Warlikowski. Ces trois artistes m’ont éblouis par leur mise en scène avant-gardiste, comme une nouvelle façon de concevoir l’espace scénique, fuir la linéarité et proposer aux spectateurs d’autres angles de vues.

 Le criquet pèlerin.

Etonnez-vous à la lecture de ce bilan que je sois épuisé ! Et je ne compte pas sur le soutien de la Direction du Festival (Vincent Baudriller et Hortense Archambault) pour me réconforter ! Ils ont complètement échoués en traitant les spectateurs réfractaires de « pèlerins », en alignant les chiffres de fréquentation comme seule réponse au désarroi du public.

Quel paradoxe ! Nous n’aurions pas eu ce festival hors normes sans eux, et c’est par leurs maladresses  que le clivage d’un festival qui se voulait pluridisciplinaire est apparu.

Il a manqué le lien…

Pascal Bély – Le Tadorne.

 

 

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Mathilde Monnier plombe la soirée du Festival d’Avignon.

Elle a pour elle la Cour d’Honneur, une excellente réputation de chorégraphe et un public à priori acquis ! Mais voilà, tout s’effondre avec « Frères et sœurs » dans un contexte de défiance à l’égard de la Direction du Festival d’Avignon.

Ce dimanche soir est morose ; la cour n’est pas au complet et je sens un public démotivé à l’égard d’une création tant décriée par la presse. Il y a de quoi…Le thème de la fratrie est complexe pour chacun d’entre nous ; Mathilde Monnier aurait pu nous parler, nous émouvoir. Or, elle s’enferme dans une vision violente articulée autour du pôle amour – haine. Tout au long du spectacle, je cherche une émotion (je suis d’une famille de 7 enfants) ; mon corps est statique et je m’étonne d’être aussi absent. Les danseurs se donnent mais semblent en dehors du message (énigmatique) de Mathilde Monnier.

Je quitte la Cour…Karolina, Peggy, Eric et Mathilde venus motivés sont dépités. Le débat s’engage avec d’autres spectateurs mais la fatigue s’installe…

Une soirée où notre groupe cherchera une dynamique à l’image de la fratrie de Mathilde Monnier. Tout est vraiment lié !

Pascal Bély, Le Tadorne

 

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FESTIVAL D'AVIGNON LES EXPOSITIONS PAS CONTENT

Festivalier perdu.

Il est 14h en ce samedi 15 juillet 2005 et les 37° degrés plombent la cité des Papes (même Benoît XVI??) ;  je me dirige péniblement vers l’Eglise des Célestins pour l’exposition de Jean Michel Bruyère et LFK « L’insulte faite au paysage…Fioretti de l’errance et de l’extermination ».Qu’écrire ?…Bon…Euh…En fait…Il fait noir puis…Non, …Des vidéos…des hommes noirs vivants debout derrière…un homme tout nu…Une femme allongée dans un trou…Un chien méchant….Au fond, un homme chien mime un chef d’orchestre…Il y a des bancs et…je m’endors…Je me réveille… Où est le propos ? De quoi s’agit-il ? Où est la piscine ?   …Non, ça c’était ce matin…Où se situe l’esthétique ? Comment peut-on réduire l’être humain à un objet d’exposition… ? Mais pourquoi donc le sens m’échappe-t-il ? Que m’arrive-t-il en cet été 2005 pour que le conceptuel me passe au dessus du tuba ?….Calmons-nous…Cette création est peut-être hors de ma portée…

Il est 16h en ce samedi 15 juillet et je me demande s’il ne serait pas mieux de louer une chambre d’hôtel et d’aller me coucher au frais…Je persiste à vouloir comprendre quelque chose…Direction le Cloître Saint Louis où un débat a lieu sur «Le spectacle vivant à la Télévision». Rien que le titre ferait mourir de rire notre ami Poutine…C’est pour dire…Le débat est d’un ennui…Cela ne m’étonne pas qu’il y ait si peu de spectacle vivant à la télévision avec de tels promoteurs…du spectacle mort – né !

Au bout de 20 minutes, je quitte le cloître avec l’impression de me noyer dans un océan de concepts et de bla – bla…

Pascal Bély – Le Tadorne

 

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FESTIVAL D'AVIGNON PAS CONTENT THEATRE FRANCAIS CONTEMPORAIN Vidéos

Pascal Rambert coule le Festival d’Avignon.

En ce dimanche caniculaire, le déluge vient de s’abattre sur Avignon. Pascal Rambert y présente « After / Before », une création très attendue (les places s’arrachaient sur le parvis !). Au départ de cette œuvre, une question très linéaire que Rambert pose à des terriens au hasard de ses rencontres à travers le monde: «En cas d’une grande catastrophe, d’un nouveau déluge , qu’emporteriez-vous surtout du monde d’avant pour le monde d’après ?». A cette question d’une paresse intellectuelle effroyable, les terriens s’efforcent de donner des réponses complexes, drôles, réfléchies, percutantes, jamais ennuyeuses au cours d’un film projeté au début du spectacle. On y entend les réponses intelligentes d’Olivier Py et de Christine Angot. Une jeune fille souligne tout de même que l’on ne peut prendre un élément en dehors de son contexte ; Olivier Py évoque l’impossibilité d’isoler un élément d’un tout (à croire qu’ils ont tous lu Edgar Morin !). Une femme émouvante parle du temps à ne plus perdre, de la communication à ne plus disqualifier. Bref, ces terriens sont formidables ! Ils sont tous porteur d’un tout, d’une globalité. Ce film est un petit bijou ; la pièce aurait pu s’arrêter là et ARTE aurait signé pour le diffuser au cours d’une Théma !

Mais Pascal Rambert a une toute autre idée de la question et des réponses (après tout c’est son droit). Son point de vue consiste à recycler les paroles des terriens! Pour cela, il démonte les paroles , coupe, remonte à sa guise. Les jeunes comédiens sont isolés chacun dans une rangée où trône à la fin une personne plus âgée. Les deux générations essayent bien de communiquer, mais en vain (on est loin de« Trois Générations » de Jean-Claude Galotta). Tout est cloisonné, les paroles sont isolées de leur contexte (seule la Télévision sait faire aussi bien !), voire disqualifiées (la réponse d’Olivier Py est ridiculisée). Un chien sur le plateau fait diversion et amuse un public manifestement désemparé pour en rire !

Non content de s’en tenir à cette première relecture des « terriens », Rambert nous remet le couvert avec une mise en musique et donc en paroles ! Et là, l’apocalypse, le vrai déluge de Rambert sous nos yeux…Les comédiens chantent faux, dansent comme à l’école primaire, se déguisent pour un carnaval funèbre. Des cris fusent du public (« Rendez-nous le chien »!);  j’ai honte de cette création et pitié pour ces comédiens ! A sa propre question, Rambert n’emporte même plus les paroles des terriens et engloutit la création du festival d’Avignon dans un océan de ridicule….

A la fin du spectacle, je suis  sonné pendant une bonne heure…J’ai apposé une affiche au cloître Saint Louis, siège du Festival : « Pascal Rambert utilise la parole des spectateurs. Reprenons-là!»

Je me suis imaginé Jan Lauwers, le fabuleux créateur de « La chambre d’Isabella » répondre à la question de Rambert. Il en aurait fait une ode à la joie, avec  Olivier Py comme vainqueur!

A vous de voir…Rambert et sa troupe squatte le Théâtre de Gennevilliers les 18 et 19 février 2006…Préferez la montagne!

Pascal Bély.

 

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Thomas Ostermeier au coeur de L’Europe.

 Lundi 11 juillet 2005. Une journée européenne.

 France Inter ; 8h20. Bernard Kouchner est l’invité du matin. Il évoque Srebrenica, dix ans après. Il semble gêné lorsque le journaliste évoque le rôle de la France lors de ce massacre. Je ne me doute pas encore que la faillite de l’Europe me guidera vers Avignon…
 Il est 22h et je suis prêt pour « Anéantis » de Sarah Kane, mise en scène par Thomas Ostermeier, artiste associé lors du Festival 2004. J’aime son théâtre et sa découverte fut une révélation l’an dernier.
 

Ce sont des scènes violentes auxquelles le public assiste ce soir (viols à répétition, scène de sexe brutales, sang,…). Tout se passe dans un hôtel en guerre à Leeds entre un journaliste et sa jeune amante…accompagné plus tard par un soldat sanguinaire. L’allusion à la guerre en Serbie est à peine voilée (le texte date de 1995). Les artistes sont magnifiques mais un processus manque pour qu’une prise de conscience politique s’opère chez le public. 24h après, je n’ai toujours pas trouvé la signification de ce manque ; j’ai le sentiment qu’Ostermeier n’est pas allé jusqu’au bout. Mais au bout de quoi ?

Dès la fin du spectacle, j’entame un débat avec ma jeune voisine. Elle ne voit pas de message politique ; l’Europe n’est pas capable d’une guerre semblable !  Elle a voté « non » au référendum…J’insiste en précisant que l’Europe s’est construite sur la paix… cet équilibre est fragile… cette jeune étudiante ne voit pas tout cela…
Je prends un coup de vieux que personne ne remarque. Maudit Festival !

10 ans après…Bravo à l’équipe du Festival de nous aider à prendre un peu de hauteur au moment même où, profitant des attentats de Londres, les pouvoirs publics relayés par des médias complaisants limitent nos  libertés fondamentales.