Retour sur ce spectacle joué cet été en Avignon et actuellement en tournée en France. Ne ratez pas ce joli moment de théâtre venu tout droit de Belgique!
"Marie – José est là…Je suis heureux de la retrouver…Nous échangeons sur l’ambiance générale du Festival au moment où la presse commence à se déchaîner (référence à l’article haineux du Figaro…L’UMP prépare les munitions…Elle n’attend que ça depuis si longtemps). Nous faisons une analyse distanciée de ce qui se passe et cela fait du bien…
Arne Sierens nous propose « Marie Eternelle Consolation".
La scène est au milieu ; de chaque côté le public. J’apprécie ce dispositif où la scène est gelée comme une patinoire !
L’histoire se passe au sous-sol d’un centre commercial dans une pièce là aussi aseptisé dont le gardien est Michel, rescapé de la vie. Il surveille les escaliers roulants et se charge des horaires d’ouverture du Centre commercial. Il est bientôt rejoint par Mimi, clown qui travaille dans les hôpitaux et son « ex » mari, Gabriel, ancien dompteur. A eux trois, ils se soutiennent, se rejettent, s’aiment. C’est un huit clos attachant même si le jeu des acteurs s’enferme parfois dans quelques longueurs et répliques stéréotypées. Arne Sierens nous montre ce que notre société de consommation est capable de meilleur et de pire. Là aussi, un nouveau monde se prépare mais Sierens ne nous dit pas lequel.
Incontestablement ce spectacle à l’humour grinçant nous a fait du bien. Il a introduit un peu de chaleur humaine dans un festival qui en manque tant. Tout festival doit être capable de proposer au public des moments d’empathie et d’espoir. C’ est la principale erreur de la Direction : avoir sous estimé le besoin d’une partie du public d’être soutenu, encouragé dans un contexte où la France se distingue par ses stratégies de repli par peur d’un monde qui se globalise…
Après ce Festival, j’irai me réchauffer…C’est vital."
Auteur/autrice : tadorne
Suite à la décision scandaleuse de Maryse Joissains, Maire UMP d’Aix en Provence, de transférer la subvention du Festival « Danse à Aix » au Centre Chorégraphique National des Ballets Preljocaj, une réaction du public s’imposait. « Danse à Aix » a donc eu la bonne idée d’inviter ce soir des chorégraphes pour offrir un spectacle gratuit à 20h30 au Théâtre du Jeu de Paume.
Je suis donc au rendez-vous pour faire la queue dès 19h afin d’obtenir le précieux sésame. Je souhaite montrer ma désapprobation face à cette décision politique mais en aucun cas soutenir l’actuelle direction du Festival qui a bien été incapable d’offrir une programmation de qualité l’été dernier.
La longue file de spectateurs est impressionnante (je doute qu’ils soient tous venus cet été !!) dans une ambiance plutôt morose. A 19h30, les portes s’ouvrent. Au bout de 10 minutes, il ne reste plus de place. Les professionnels semblent avoir raflé la mise et le public reste largement sur le carreau.
Je pars quelque peu désabusé non sans avoir fait part au Directeur du Festival de ma profonde déception (« à quoi bon inviter le public si c’est une soirée privée ! »).
L’enterrement de « Danse à Aix » a donc eu lieu entre professionnels; loin du public. Dont acte. Il y a des fins plus glorieuses. Ce n’est finalement que la continuité d’une perte du lien amorcée cet été (voir le bilan sur ce blog).
Il revient donc aux Ballets Preljocaj de relever le défi : renouer les liens avec le public, offrir une programmation innovante et envoyer à l’UMP des signes forts d’indépendance.
Un défi titanesque dans une ville sans projet de développement où la politique culturelle repose sur un mythe.
En ce vendredi 2 décembre 2005, le Théâtre des Salins à Martigues est à moitié vide . En hiver, l’ambiance y est comme d’habitude glaciale. Pourtant, la pièce mise en scène par Dan Jemmett, « William Burroughs » avec Denis Lavant et co-produit par le Théâtre de la Ville mériterait un public plus chaleureux.
C’est une belle ballade en mer auquel le texte de Johnny Brown nous emmène, appuyé par une mise en scène dont l’énergie repose sur l’incroyable poésie de Denis Lavant dans le rôle de William Burroughs. Dans cette pièce, tout est métaphorique (le bateau ressemble à une station service) ; rien n’est vrai mais tout sonne juste comme le long poème de Coleridge (« Le chant du vieux marin ») qui sert de trame à la pièce. Je me suis donc retrouvé sur ce bateau fou, accroché à ce délire poétique, guidé par la fougue de Lavant.
Bon vent à « William Burroughs » et que le Théâtre des Salins poursuive sa programmation audacieuse, contre vents et marées.
Le public est debout, ovationne ce trio. Emu par ce lien entre elles et nous, entre le Festival et son public, entre les arts et le monde…
C’estle spectacle le plus cher de l’année (30 euros) auquel le Théâtre Toursky à Marseille me convie ce soir : le 1er cirque acrobatique aérien d’Afrique ! La salle est majoritairement blanche, la scène est africaine. Le prix explique peut-être cela. Mais pas seulement. « Les tambours sauteurs », titre du spectacle, mêle chants, danses, prouesses sportives, théâtre. Un mélange sans queue ni tête.
Si les figures aériennes peuvent impressionner, le propos artistique est faible. La musique repose sur des tempos assez plats que même quelques morceaux de rap ne viendront pas dynamiser (on se demande d’ailleurs ce que vient faire cette musique si ce n’est pour donner un coup de jeunesse…déplacé). Les scènes théâtrales sont ridicules et véhiculent toujours les mêmes clichés sur l’Afrique (le voleur, le commandant corrompu, le sorcier, …).
Le public, hystérique, ne cesse d’applaudir. Je reste figé devant cette relation si déséquilibrée entre un public blanc et ces artistes noirs. Au moment où le débat sur la colonisation revient en force, où les populations africaines sont stigmatisées, « Circus Baobab » ne fait que reproduire un rapport nord – sud vieillot et sans avenir. Drôle de constat dans ce théâtre politiquement marqué à gauche.
Tout commence plutôt bien en ce jeudi 1er décembre 2005. J’ai rendez-vous avec Baptiste Trotignon, grand pianiste de Jazz Français. J’ai l’habitude de le suivre depuis quelques années. Ce musicien me fascine…Il est à Sète ce soir, dans un « lieu » culturel…Dès mon arrivée, je suis invité à prendre place autour de tables de banquet alignées les unes à côté des autres (souvenez-vous de certains mariages ou baptêmes où vous étiez assis à côté du saoulard de service !). Quitte à être en avance, je déguste pour la somme modique de 10 euros huîtres et produits locaux ! Même si cela peut paraître séduisant au premier abord, écouter du jazz dans un tel contexte relèvera de l’exploit. Philippe Léogé, pianiste local, assure la première partie pendant 50 minutes en continu ! Cet homme se fait manifestement plaisir et rien ne le perturbe (ni les chaises qui grincent sur le carrelage, ni le malaise d’un spectateur victime peut-être d’une huître rebelle). Sa prestation arrive à me saouler, bien plus qu’un verre du cru local…Il est enfin 22 heures quand le Quartet arrive sur scène. Ces musiciens sont magnifiques : je suis transporté dans leur univers tout en finesse où tout s’articule comme dans une symphonie malgré les problèmes techniques qui nous empêche, pendant les 10 premières minutes, d’entendre la belle contrebasse de Darryl Hall !
Trotignon et El Malek sont complices, cela s’entend et se voit au détriment peut-être des deux autres musiciens. Trotignon joue du piano comme un saxophoniste et El Malek se transforme en pianiste virtuose avec son saxophone. Mais le plus magique dans ce concert, c’est la légèreté de l’ensemble au détriment peut-être d’un petit grain de folie qui aurait pu faire danser le public sur les tables au milieu d’un gravas d’huîtres ! Mais, il reste froid comme la banquise malgré les envolées du batteur ! Les chaises continuent à grincer le tout accompagné d’apartés et de conversations via le portable. J’ai l’impression d’assister à deux concerts en même temps…Serré comme des huîtres de Bouzigues dans une bourriche, le public joue le cadre qu’on lui pose. Ma colère s’adresse plutôt aux organisateurs qui font offense à la musique de ce quartet. On n’écoute pas du jazz dans un tel cadre. On le subit. Un seul rappel (mou) suffira à notre quartet pour revenir sur scène. Les pauvres applaudissements renvoient ce public d’opérette dans ses pénates. La passerelle entre les huîtres et le jazz ne mène nulle part. Les responsables de la Scène Nationale de Sète et du bassin de Thau peuvent malgré tout vous aider dans l’organisation de votre prochain banquet.
En concert au Sunside à Paris du 16 au 18 février 2006 puis:
– 1er mars à Rambouillet.
– 8 mars à Tours la Riche.
– 23 mars à Metz.
– 21 avril à Nantes.
A lire sur le même sujet:
"Fred Pallem sacre l’Avignon Jazz Festival".
"Le jazz brûlant de Julien Loureau à l’Avignon Jazz Festival"
A lire Florent Marchet quitte…la scéne nationale de Cavaillon.
Il était temps…Je commençais à m’ennuyer depuis le festival d’Avignon 2005 ! « L’idiot » de Dostoïevski, beau texte traduit par André Markowicz et mise en scène par Antoine Bourseiller a fait souffler un vent de modernité au Toursky. Les comédiens sont attachants de sincérité, de modestie, avec une mention toute particulière à Jade Duviquet qui donne à Nastassia Philippovna un charisme a faire chavirer le cœur des hommes…même les plus durs ! Alexandre Ruby, en Prince Mychkine, est troublant de vérité quand il traduit les sentiments secrets de ses interlocuteurs. Et puis, il y a cette mise en scène d’Antoine Bourseiller ! La pièce, structurée en différents petits actes, permet des changements de décor (le jeu avec l’espace traduit la complexité des sentiments) pendant que le public est éclairé par des projecteurs…bleus ! Ces différents intermèdes donnent un rythme soutenu à la mise en scène, comme si le Prince Mychkine, pour mieux scruter nos secrets, devait nous éblouir d’une lumière bleue. La voix de Suzanne Flon accompagne un moment de vidéo de toute beauté. « L’Idiot » devient par la magie d’Antoine Bourseiller et de ses acteurs, une pièce d’une grande modernité.
Nous aurions besoin d’un Prince Mychkine plutôt que d’un monarque vieillissant, sourd et aveugle. Mais…je m’égare !
Une semaine pour écrire…sur « La Cité Radieuse » chorégraphie de Frédéric Flamand, vue au Théâtre de la Criée de Marseille samedi 5 novembre 2005.
Une semaine pour vous faire part d’une œuvre saluée par la presse, le public et qui m’a laissé indifférent pour ne pas dire…dépité.
Une semaine pour tenter de dénouer les fils…Rien n’y a fait.
Je suis plombé par le contexte marseillais et français. J’ai vu cette œuvre au moment où les traminots reprenaient provisoirement le travail après une grève de 32 jours. Suis-je toujours en 2005 pour qu’un tel conflit social s’éternise ? Marseille a le visage d’une ville en dehors de la modernité, repliée sur des bastions, engluée dans la pauvreté. Frédéric Flamand a-t-il senti cette fragilité, ce totalitarisme rampant au moment de concevoir « La cité radieuse » ? Il y a de quoi douter vu les réactions du public marseillais.
Pourtant, l’idée lumineuse de revisiter «La cité radieuse » de Le Corbusier en collaboration avec l’architecte Dominique Perrault pouvait donner de la perspective, du propos, du sens au moment même où les banlieues explosaient. Puisqu’il s’agissait de « créer une vision au-delà du miroir » (dixit Perrault)…Promesse non tenue à la limite de l’imposture ! J’ai bien tenté, comme on me l’y invitait, à ne plus me centrer sur un point de la scène mais à naviguer tantôt vers les images numériques, tantôt vers les mouvements du danseur ou du collectif. Certes. Mais pour quoi ? Plus le spectacle avançait, plus je m’en éloignais comme si tout cela ne m’était pas adressé. Etrange sensation, ni agréable, ni désagréable.
Une semaine pour écrire sur l’indifférence!
A la fin de la représentation, le public criait sa satisfaction ! Je me croyais à une manifestation sportive ! Le comportement du public répondait-il à un message subliminal de Flamand ? Lequel ? En quittant rapidement la salle, j’ai pris le temps de lire la revue de presse (très positive) sur ce spectacle. Mon regard est attiré par un titre – Frédéric Flamand : "les marseillais sont fiers de leur ville"-. C’est donc peut-être cela. Au-delà du miroir, il y a peut-être l’acte d’engagement de Frédéric Flamand au Ballet National de Marseille. Ou alors, le désir de redonner de la fierté aux marseillais comme au temps de Le Corbusier.
La fierté…Il serait peut-être temps de sortir de ce petit jeu démagogique et de donner aux marseillais autre chose que leur miroir déformé.
Je m’égare…peut-être.
A lire les différents sujets "Danse" du Tadorne:
Le Ballet d’Europe à la Friche Belle de Mai: l’imposture rêvée…
« La fin des terres » de Philippe Genty enveloppe le public du Toursky…
La place du Singe" d’Angot, Monnier: le beau souvenir d’Avignon 2005.
La magie inoubliable de Raimund Hoghe sur ARTE.
"Danse à Aix": les faux pas de l’édition 2005
"Last Landscape" de Joseph Nadj: l’autoportrait des festivaliers?
Mathilde Monnier plombe la soirée du Festival d’Avignon.
Christian Rizzo: le magicien du Festival d’Avignon.
L’Europe vu par Roméo Castellucci au festival d’Avignon
Angelin Preljocaj et "Les 4 saisons": l’exil à Châteauvallon!
William Forsythe, "You made me a monster", …
Vandekeybus au Festival d’Avignon: « Puur » se perd…
B. ¹03 Berlin de Roméo Castellucci m’a perdu…
« Anathème » de Jacques Delcuvellerie: la messe est dite.
Jan Fabre et "l’histoire des larmes": le rendez-vous manqué.
Les réseaux européens de Danse au Festival de Marseille: une forme olympique?
La chambre D’Isabella: les retrouvailles d’Avignon 2004
Anne Teresa de Keersmaeker: la désunion…
C’était dimanche soir à 20h15 sur ARTE. Alors que la moitié des téléspectateurs regardent Sarkozy sur TF1 utiliser la misère d’une partie de la population à des fins personnelles et vomir sa haine de la différence, ARTE diffusait un magnifique film de danse, “Cartes postales” du chorégraphe Raimund Hoghe avec Lorenzo de Brabandère, son danseur fétiche. J’ai découvert pour la première fois Raimund Hoghe, disciple de Pina Bausch et…bossu, au festival “Montpellier Danse” en 2004. “Young People, Old Voices“ avait duré 3 heures. Le public était bouleversé et une longue ovation de vingt minutes avait clôturée cette soirée magnifique.Je ne m’attendais pas à retrouver une telle émotion, surtout à la télévision.Et pourtant…Comment expliquer la magie d’un tel film?
Les pas, les gestes de Hoghe et de Lorenzo sont d’une précision bouleversante, d’une tendresse infinie. Filmé avec brio par Richard Copans, “Cartes Postales” est un hymne à la différence, à l’ouverture, à la communication. Entre Raimund et Lorenzo, tout est question de circularité, de rondeurs, de déplacements où l’un est interdépendant de l’autre.Au même moment, un ministre d’Etat parle de “racaille” pour stigmatiser une partie de la population française…
Pascal Bély – Le Tadorne
Voir le film ici.