S’il est des textes dits « classiques » qui à certains moments ont la portée d’être d’actualité, « Le procès » de Franz Kafka est de ceux-là. Le metteur en scène allemand Andreas Kriegenburg nous en offre une démonstration magnifique.
Au-delà de l’absurde et de la noirceur du texte, nous sommes invités à en percevoir le côté « burlesque ». La mise en scène convoque l’esprit du cinéma muet et nous renvoi vers ces héros des temps modernes qu’enfant nous avions du mal à comprendre plus loin que le premier degré. C’est une proposition qui nous emmène inévitablement l’esprit à l’Est et l’on pense au chorégraphe Joseph Nadj. Le dispositif scénique qui évoque un oeil, un puits, une focale, éveille les images et l’imaginaire avec une grande richesse: toujours à l’Est, Pabst et à l’ouest Buster Keaton, Lloyd, Chaplin? La scénographie magnifique éclaire l’écran de nos nuits blanches, mais peut, parfois, nous faire perdre le fil tant elle ouvre vers d’autres univers. C’est peut-être là le défaut d’être trop tenté de créer de l’image sur scène.
Pour mieux souligner l’universalité de K, ici il est unique et multiple. Un, trois, cinq, sept c’est par l’impair qu’il s’illustre.
Il finira un, chemise éclaboussée de sang sur la roue du temps, délaissé par ses pairs, un seul suffira pour la survie temporaire des autres.
Bernard Gaurier – www.festivalier.net
“Der Prozess” de Franz Kafka mis en scène par Andreas Kriegenburg au Festival d’Avignon les 16, 17 et 18 juillet 2010.