François Chaignaud et Cecilia Bengolea sont appréciés du Théâtre du Merlan de Marseille. Trois de leurs créations y sont présentées en moins d’une semaine. Les honneurs d’une Scène Nationale sont au mieux un beau pari sur l’avenir, au pire une stratégie de communication où la forme prime sur le fond. La première « Pâquerette » avait fait le plein d’audience à Berlin et Paris ainsi que sur les blogs de critique. Leurs « stratégies de pénétration » avaient pourtant provoqué un débat un peu mou parmi les spectateurs et la critique, faute d’un propos suffisamment fort et lisible. Même si « l’introduction d’un godemiché ne fait pas encore une danse », j’avais applaudi leur audace.
Leur deuxième proposition, « Sylphides », « pour adultes uniquement » (on se demande bien pourquoi), est un concept. Saluons le projet novateur de ce duo qui se nomme « concepteur » plutôt que « chorégraphe », pour « fabriquer » de la danse. Si les mots ont un sens, rendons hommage à cette autocritique.
Qu’attendre d’un concepteur si ce n’est qu’il nous propose des formes moins esthétisantes, porteuses de sens et de vision ? Or, « Sylphides » n’est qu’une très belle esthétique du corps. Difficile donc d’évoquer ce concept sans entrer dans une description un peu laborieuse. Ici, le corps est aérien puis perd toutes ses articulations, avant de devenir quasiment liquide. Par une étrange alchimie, il se transforme jusqu’à se métamorphoser en forme dansante sur un air de Madonna. L’ambiance est totalement mortifère (la série « Six feet under » aurait-elle inspiré ?) et l’on sourit lorsque nos trois danseurs, en état de larve, cherchent une issue de secours. Le corps est dansé de l’intérieur, mais il ne véhicule que sa propre image. C’est elle qui fait sens et confère au propos une pauvreté déconcertante. J’observe une « recherche », je recherche une « poétique « et me voilà positionné comme évaluateur d’un concept (il en serait sûrement tout autrement dans un espace d’art contemporain).
Conceptuellement, « Sylphides » se regarde, mais sa programmation par une Scène Nationale est en soi un aveu d’échec : le corps n’a donc plus rien à véhiculer ; la danse n’est plus un propos en soi.
Démission.
Pascal Bély
www.festivalier.net
« Sylphides» de Cecilia Bengolea et François Chaignaud a été joué le 4 avril 2009 au Théâtre du Merlan de Marseille.
Photo: ©Alain Monot.
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François Chaignaud sur le Tadorne: L’anus horribilis de Cecilia Bengolea et François Chaignaud. |