Les hangars (toujours aussi hideux) du parc des expositions d'Avignon accueillent « Insideout » de la chorégraphe berlinoise Sacha Waltz. Perdu au sud de l'agglomération, cet endroit (vestige du pire de l'architecture française) sied parfaitement à l'une des propositions inoubliables de cette 61e édition : l'écrasement du laid par vingt danseurs, dix musiciens, une nouvelle ville à l'intérieur du bâtiment avec ses escaliers, ses guichets, ses annonces sonores (il est interdit de penser, de…), ses pièces, ses jardins suspendus, ses prisons, ses places publiques, ses plages, ses chambres froides. Une ville nouvelle dans un édifice construit dans les années soixante. La création dans du moderne vieillisant. Le festival de Sacha Waltz dans le Festival d'Avignon. Les spectateurs dans l'acteur, l'acteur dans le spectateur. Vous l'aurez deviné, point de gradin, ni de haut vers le bas et inversement, mais vive la circularité, le mouvement, la construction de son propre spectacle.
En arrivant, un homme me confie en anglais une lorgnette ; je ne comprends strictement rien. Mais à quoi sert-elle ? Pour voir quoi ? Scruter qui ? Je m'avance ; un bruit du tonnerre. Des pièces partout, danseurs à terre. Je suis immédiatement happé par un jeune homme, enfermé, assis, qui parle à travers la vitre. Son corps se plie, se déplie. Je l'observe, ému : il est beau même enfermé. Voyeur, j'aimerais changer la donne, casser la vitre, le libérer de cet espace. Tout est posé : Sacha Waltz, à partir des différents tableaux auxquels je vais assister, travaille mon positionnement, mon lien à la culture, à la danse, à l'autre, à l'Autre. De l'observateur passif, je deviens le spectateur actif. C'est ainsi que l'on s'étonne d'observer aussi le public se déplaçant de pièce en pièce comme il le fait au musée ou dans un grand magasin. Waltz a donc quatre-vingt-dix minutes pour transformer la donne, métamorphoser le lien, pour que spectateurs et artistes créent, par la rencontre, l'?uvre collective. Elle nous donne les ouvertures, les fentes ( !), les passerelles et le stress pour pouvoir nous ouvrir, circuler, bouger, changer, renaître, abandonner, imaginer, revenir, perdre la tête, pleurer, rire, passer son chemin ! Elle nous propose d'entrer en résonance avec l'histoire des artistes par une proximité quasi corporelle, par l'émotion que procurent ordinairement de vieilles photos d'album de famille. Certains portent leur histoire (familiale) comme un fardeau, d'autres s'enferment dans leurs névroses. Il faut parler, relier pour ne pas se laisser emmurer. Osons nous revoir dans l'intergénérationnel, réinterrogeons notre passé commun !
Et c'est toujours une question de regard : là où je ris, d'autres ont peur. Là où je pleure (j'ai vu le train partant vers Autchvicht où des yeux, des bras, par des tous carrés dans le mur font danser une jeune fille dont les jambes sont prolongées par des bas remplis de sable. Voudrait-elle disparaître avec eux ?), d'autres ne s'arrêtent même plus. Car Waltz joue aussi avec notre corps : il peut s'immiscer partout (ne mettre que la tête pour apercevoir, insérer la main dans des fentes, s'appuyer contre un mur coulissant, s'asseoir comme nous le faisions petit pour voir le théâtre de guignol). Et je marche, je marche. J'ai mal à force de rencontrer ces artistes qui me renvoient toujours une émotion, une image. Je rêve eveillé, je cauchemardise à force de violence, de sirène : Waltz nous montre aussi la société que nous produisons à force de contrôle, de consommation (que de vitrines où manequins vivants et objets insignifiants captent notre regard !). Elle arrive avec le groupe « Musikfabrik » à rendre l'ambiance sonore de nos sociétés ivres de pouvoir, de possession et de concurrence. Par ce parcours chaotique, Waltz nous invite à nous libérer de nos aliénations pour reconstruire une histoire, nous remettre dans une posture de coconstruction. Elle nous prépare, à sa façon, à repenser notre lien à l'art (qui ne peut plus être une marchandise au risque de produire de nouveaux totalitarismes), à nous interroger sur nos comportements de consommateur de tout (que laissons-nous au désir, à la frustration de ne pas avoir ?). Waltz nous met en posture de créer le mouvement là où nous avons figé névrotiquement.
« Insideout » , dedans-dehors, pascal ? pascal fils de?, parler ? s'entendre parler, faire ? penser le faire, passé ? présent ? futur, « insideout » – festival d'Avignon ? l'art européen, ???.Tout est ouvert??.
Pascal Bély
www.festivalier.net
En arrivant, un homme me confie en anglais une lorgnette ; je ne comprends strictement rien. Mais à quoi sert-elle ? Pour voir quoi ? Scruter qui ? Je m'avance ; un bruit du tonnerre. Des pièces partout, danseurs à terre. Je suis immédiatement happé par un jeune homme, enfermé, assis, qui parle à travers la vitre. Son corps se plie, se déplie. Je l'observe, ému : il est beau même enfermé. Voyeur, j'aimerais changer la donne, casser la vitre, le libérer de cet espace. Tout est posé : Sacha Waltz, à partir des différents tableaux auxquels je vais assister, travaille mon positionnement, mon lien à la culture, à la danse, à l'autre, à l'Autre. De l'observateur passif, je deviens le spectateur actif. C'est ainsi que l'on s'étonne d'observer aussi le public se déplaçant de pièce en pièce comme il le fait au musée ou dans un grand magasin. Waltz a donc quatre-vingt-dix minutes pour transformer la donne, métamorphoser le lien, pour que spectateurs et artistes créent, par la rencontre, l'?uvre collective. Elle nous donne les ouvertures, les fentes ( !), les passerelles et le stress pour pouvoir nous ouvrir, circuler, bouger, changer, renaître, abandonner, imaginer, revenir, perdre la tête, pleurer, rire, passer son chemin ! Elle nous propose d'entrer en résonance avec l'histoire des artistes par une proximité quasi corporelle, par l'émotion que procurent ordinairement de vieilles photos d'album de famille. Certains portent leur histoire (familiale) comme un fardeau, d'autres s'enferment dans leurs névroses. Il faut parler, relier pour ne pas se laisser emmurer. Osons nous revoir dans l'intergénérationnel, réinterrogeons notre passé commun !
Et c'est toujours une question de regard : là où je ris, d'autres ont peur. Là où je pleure (j'ai vu le train partant vers Autchvicht où des yeux, des bras, par des tous carrés dans le mur font danser une jeune fille dont les jambes sont prolongées par des bas remplis de sable. Voudrait-elle disparaître avec eux ?), d'autres ne s'arrêtent même plus. Car Waltz joue aussi avec notre corps : il peut s'immiscer partout (ne mettre que la tête pour apercevoir, insérer la main dans des fentes, s'appuyer contre un mur coulissant, s'asseoir comme nous le faisions petit pour voir le théâtre de guignol). Et je marche, je marche. J'ai mal à force de rencontrer ces artistes qui me renvoient toujours une émotion, une image. Je rêve eveillé, je cauchemardise à force de violence, de sirène : Waltz nous montre aussi la société que nous produisons à force de contrôle, de consommation (que de vitrines où manequins vivants et objets insignifiants captent notre regard !). Elle arrive avec le groupe « Musikfabrik » à rendre l'ambiance sonore de nos sociétés ivres de pouvoir, de possession et de concurrence. Par ce parcours chaotique, Waltz nous invite à nous libérer de nos aliénations pour reconstruire une histoire, nous remettre dans une posture de coconstruction. Elle nous prépare, à sa façon, à repenser notre lien à l'art (qui ne peut plus être une marchandise au risque de produire de nouveaux totalitarismes), à nous interroger sur nos comportements de consommateur de tout (que laissons-nous au désir, à la frustration de ne pas avoir ?). Waltz nous met en posture de créer le mouvement là où nous avons figé névrotiquement.
« Insideout » , dedans-dehors, pascal ? pascal fils de?, parler ? s'entendre parler, faire ? penser le faire, passé ? présent ? futur, « insideout » – festival d'Avignon ? l'art européen, ???.Tout est ouvert??.
Pascal Bély
www.festivalier.net
?????? « insideout » a été joué le 13 juillet 2007 dans le cadre du Festival d’Avignon.
Crédit photo: André Rival.