Chaque année, c’est un rituel. A la fin du périple festivalier de l’été, je pars à Manosque pour réapprendre à lire et à écrire ! Comme s’il fallait s’éloigner du théâtre, pour se rapprocher autrement des mots. Durant une semaine, lectures de correspondances, ateliers d’écriture et concerts littéraires se succèdent. L’ambiance y est chaleureuse loin des mondanités de certains festivals…
Lire sur scène est un exercice difficile. Ce n’est ni du théâtre, ni une lecture mais une pratique artistique encore émergente. Cette année, trois spectacles retiennent mon attention : deux comédiens (Eric Caravaca et
Guillaume Depardieu) et un chanteur (Florent Marchet).
Une heure après Depardieu, Florent Marchet, jeune chanteur talentueux découvert il a un an et demi avec son magnifique album « Gargilèse », nous propose son spectacle, spécialement conçu pour les Correspondances de Manosque. L’an dernier, son premier ballon d’essai lors d’un café littéraire avait fait l’événement. A ces côtés, le troublant Erik Arnaud (son premier album en 2002 « Comme je vis » est resté confidentiel) et Arnaud Cathrine (jeune écrivain) et deux musiciens (un batteur et un bassiste). La scène est minuscule et tout au plus une soixantaine de privilégiés sont invités à ce concert! Le thème du couple sert de fil conducteur où alterne lectures et chansons pour la plupart nouvelles (prémices du deuxième album ?).
Florent Marchet réussi là où ses camarades comédiens ont échoués. En premier lieu, il s’est fortement engagé dans l’exercice; cela se sent et se voit!Le groupe a travaillé pour arriver à nous présenter une telle cohérence dans les choix littéraires et leurs illustrations musicales. De plus, Florent Marchet fait preuve tout au long du concert d’un sens de l’humour que je ne lui connaissais pas. Un an après, il a pris de l’assurance et je ressens un artiste en plein travail sur son deuxième album.
Le couple vu par Marchet à travers ses choix littéraires a de quoi troubler : union impossible, viol, inceste, misère sexuelle, masturbation thérapeutique, ennui, mauvaise haleine…Tout y passe et les textes lus par Erik Arnaud et Arnaud Cathrine appuient là où cela fait mal…Seuls les célibataires (dont votre serviteur) sortiront peut-être de cette soirée quelque peu apaisé !!
Au final, Florent Marchet a peut-être donné à la Direction du Festival une image de ce que pourrait être les Correspondances dans l’avenir, à savoir une magnifique articulation entre la musique et la littérature. Le couple chanteur – écrivain pourrait signifier aux comédiens de théâtre et de cinéma que la chanson n’est peut être pas un art aussi mineur que cela.
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