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Les Arts Sauts avec « Ola Kala ! » sautent dans le vide.

C'est un peu gênant. Des amis vous offrent une place pour la nouvelle production des Arts Sauts, « Ola Kala ! » et à la fin du spectacle, vous leur lancez : «Je suis consterné ». En écrivant cet article, j'ai bien conscience d'aller à contre-courant de mes amis et du public marseillais qui n'ont pas hésité à applaudir chaleureusement ces “Sauts” dont j’ai cherché le sens.

[youtube=http://www.youtube.com/watch?v=d6fQGwU8d-o&w=390&h=314]

« Ola Kala ! » est programmé dans le cadre du Théâtre du Gymnase. Je m'attends donc à voir une ?uvre artistique, ou du moins une rencontre entre la performance sportive et l'art (on peut toujours rêver?). Peine perdue. Tout commence par des trapézistes qui font d'interminables allers-retours à partir de quelques diagonales qui ravissent. Il y a bien quelques musiciens perchés avec leur violon et leur contrebasse, une chanteuse dont on dirait qu'elle murmure dans un mégaphone en panne de piles, une musique mi-techno ? mi-opéra, des costumes si laids qu'on les croirait tout droit sortis d'un magasin Gap. Cela donne un vernis culturel aux prouesses physiques, mais c'est insuffisant pour qualifier « Ola Kala ! » d'?uvre artistique. Les trapézistes de la troupe le souhaitent-ils ? D'ailleurs, que veulent-ils ? À compter le nombre de chutes volontaires et involontaires, on se met à douter de leur désir d'être en l'air et sur scène. L'accident grave d'un des leurs l'an dernier, pèse sur la dynamique de groupe à l'image de ce filet qui retient tout. Il y a pourtant une joli moment de poésie entre deux femmes, mais il est noyé au milieu des prouesses masculines répétitives, saluées en continu par le public. L'ensemble est lourd, lent, peu créatif et l'« ange bouffon » avec ses ailes en carton ne peut rien y faire (que fait-il là, d'ailleurs ?).
Au final, « Ola Kala » est un trompe-l’?il qui survole l'art du cirque. Ceci est ma chute et la leur.

Pascal Bély – www.festivalier.net

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Le Festival de Marseille dépoussière avec “A-Ronne II”

Il fallait quand même oser ! Programmer «A-Ronne II » au Gymnase, lieu du conformisme théâtral, a de quoi décoiffer même les perruques les mieux amarrées. Je n’aime pas ce lieu : on y est la plupart du temps mal assis et son public est l’un des plus impolis que je connaisse. Cela explique pourquoi je m’y sens si souvent oppressé. Le public du Festival de Marseille semble différent ce soir pour cette pièce crée en 1996 par Ingrid von Wantoch Rekowski basé sur l’œuvre "d’A-Ronne" du compositeur Luciano Berio. Ils sont cinq sur scène (sommes-nous au moyen âge ?) pour interpréter avec leur corps et leur voix cette œuvre « musicale ». Car l’univers vocal de Berio n’a pas grand-chose à voir avec l’opéra classique. "A-Ronne" c’est l’art du burlesque et de la  communication! On comprend à peine les mots qu’ils prononcent (à part peut-être « phallus » et « sexe », n’est-ce pas l’essentiel ??) mais tout est dit tant les corps et les sons expriment la musicalité des rapports humains et sociaux. Chaque onomatopée, chaque mouvement du corps (alors qu’ils sont assis) sont une note, si bien que je suis en train de lire une partition de solfège !
Or, à mesure qu’ "A-Ronne II" se déroule, je ressens une fatigue à maintenir une telle attention : la performance des acteurs est aussi celle du spectateur. On ne s’étonnera pas que la durée de l’œuvre (50 minutes) soit celle d’un spectacle de danse comme si Ingrid von Wantoch Rekowski avait chorégraphié une comédie humaine où nous serions pris au piège à force de la regarder. Décoiffant.

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Le Festival de Marseille fait tomber les murs de La Criée avec « Eraritjaritjaka, Musée des Phares »

« Que va-t-il encore m’arriver ce soir ? ». Telle est ma question alors que j’arpente le hall du Théâtre de la Criée pour le deuxième spectacle du Festival de Marseille. Le titre imprononçable de la pièce, le texte opaque de la bible brouille les pistes. Installé, je tente de me laisser aller. Un quatuor prend place sur scène, lumière blanche, sol noir et Bach en introduction. Un homme arrive en costume trois-pièces (sublime André Wilms) et le décor se transforme. La lumière bouge, le suit et l’éclaire comme s’il cherchait la voie, le chemin. Il joue des fragments de textes d’Elias Canetti (1905 – 1994), prix Nobel de littérature. La mise en scène d’Heiner Goebbels prend alors des allures féeriques : l’homme s’amuse avec des robots comme avec un animal de compagnie. Métaphore d’une société déshumanisée, les textes poétiques de Canetti frappent par leur justesse et leur résonance. Mais je me sens enfermé, comme s’il n’y avait plus d’échappatoire dans cette société en perte de sens. Où vais-je dans ce spectacle ? Je suis rapidement perdu comme si je n’arrivais plus à relier le texte, la musique et le jeu de l’acteur. Fatigue ? Incompréhension ? Un vacarme envahit la salle ; les lumières dessinent sur la scène par petits points une ville futuriste. Je perds définitivement pied.
Une maison en miniature arrive sur scène ; comme suite à un numéro de magie, elle se met à fumer et s’éclaire pour finalement finir en fond d’écran où va se projeter l’impensable ! L’homme quitte la scène, accompagné d’un caméraman. Nous suivons son périple sur la « maison- écran ». Une voiture l’attend devant le Théâtre de la Criée. Installé à l’arrière, il nous parle avec les mots de Canetti. Rêve ? Réalité ? Je ne sais plus où je suis: comment Goebbels peut-il oser cela, nous laisser converser avec ce quatuor dedans alors que le comédien est dehors. Arrivé  de l’autre côté du port, il sort de sa voiture et entre chez lui. Le journal « La Provence » daté d’aujourd’hui est à terre. Nous rions. Il est donc bien dehors. Le cameraman accompagne les mots avec brio. Pour la première fois de ma vie de spectateur, la vidéo est une oeuvre d’art à part entière tant les mouvements de la caméra sont poétiques (moment de pure beauté lorsque le vieil écrivain est filmé à travers les grilles de la planche à repasser !). Nous partageons son intimité alors qu’il se prépare une omelette (on sentirait presque l’odeur dans la salle). C’est bon, je suis avec lui. Comme devant un tour de magie, je suis émerveillé de la prouesse technique et artistique. Et puis, tout se brouille à nouveau comme un poème dont le livre se transformerait au fur et à mesure que vous le lisez : de papier, il devient écran puis partition de musique. Par quel miracle, retrouvons-nous le sur scène avec le quatuor ? Comment peut-il être ici et là ? Le lien avec ce vieil homme attaché à son écriture pour vivre, m’envahit. Je me sens dedans sa maison et dehors pour l’observer. Le metteur en scène Heiner Goebbels signe une pièce majestueuse, car il brouille nos repères et nous positionne comme acteur de ce que nous voyons. Cette posture du dedans – dehors est une réponse au texte pessimiste de Canetti pour qui la société perd le sens. Le fait même que je quitte ce spectacle heureux, curieux, ouvert prouve à quel point la mise en scène de Goebbels donne cet espoir dont nous avons besoin : un monde ouvert où la pluridisciplinarité, en abattant les cloisons de nos maisons, ouvre le plus beau des chantiers : reconstruire ce que l’on n’avait pas prévu.

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Au Festival de Marseille, « L’’homme de février » dépasse la dose prescrite.

C'est avec cette ?uvre inclassable que s'ouvre le Festival de Marseille ! J'ai la douce impression de poursuivre le KunstenFestivaldesArts de mai dernier à Bruxelles tant « l'homme de février » de Gildas Milin est profondément transdisciplinaire.
Nous arrivons au Théâtre de la Criée de Marseille et les comédiens (habillés en tenue de plongée) nous accueillent dans une petite salle. Une centaine de personnes prend place à partir d'un dispositif bifrontal. Cette proximité avec les acteurs et le public n'est pas anodine ; elle nous plonge au c?ur de la folie, de la déconstruction. Pour entrer dans « l'homme de février » autant oublier nos schémas rationalistes (des acteurs, un texte, un début, une fin) ; seule un telle disposition de la salle peut aider le public à se laisser aller à sa créativité.
Décidément, après « Psychiatrie / Déconniatrie » de Serge Valletti, « VSPRS » d'Alain Platel, « sx.rx.Rx » de Patricia Allio, « Lugares Communes » de Benoît Lachambre, je suis en quelques mois projeté dans l'univers de la déconstruction. Coïncidence ? Mouvement artistique de fond ? Toujours est-il que depuis la crise de l'intermittence en 2003, les frontières entre les disciplines me paraissent bien poreuses. Théâtre, danse, arts plastiques, musique, tout semble s'enchevêtrer pour mieux déconstruire nos schémas linéaires. Dans ce monde complexe, ouvert,  le rationalisme scientifique rend fou, le politique prend le contrôle des comportements pour mieux s'immiscer dans la psyché (l'UMP légifère sur la psychanalyse, Sarkozy veut détecter les actes déviants dès le plus jeune âge). Les artistes alertent et nous positionnent au c?ur de cette prise de conscience : les théories comportementalistes nous amènent tout droit vers le fascisme. Vouloir contrôler la psyché pour faire face à la complexité est une pure folie. Gildas Milin le sent et compte bien nous le faire sentir. Mais je suis fatigué ce soir : j'ai travaillé avec une équipe de la petite enfance toute la journée pour les accompagner à se décloisonner, à tendre vers la vision globale, la créativité?
Cristal arrive sur scène (magnifique Julie Pilod) ; elle ne cesse de répéter « je ne suis pas sûre ». Elle court, se jette à terre, se relève. Les mots sont mécaniques, comme un robot. Elle est entourée de huit plongeurs qui, comme dans une salle des machines, donnent des consignes. Cristal, chanteuse de rock de son état, est donc sous contrôle et l'espace scénique semble sous l'?il d'une vidéosurveillance. Cristal est désespérément seule et la prise de médicaments est son alternative pour survivre dans ce monde si complexe. Elle se promène avec sa mallette remplie de potions (des bêta – bloquants) qui vont diffuser dans son corps des milliers de molécules aux missions très précises (être rationnel, avoir des émotions contenues,?). Christelle, son amie, veut l'aider pour sortir de cette souffrance. Elle invente un clone, « l'homme de février », dont le pouvoir est de la rendre heureuse. Ce clone la suit du regard; il s'installe dans le public (comme un simple spectateur) ; se lève parfois pour être à côté d'elle puis reprend sa place parmi nous. S'enchaîne alors différentes scènes où alterne transe, conscience, et inconscience. Nous voyageons dans la psyché de Cristal. Comme des voyeurs, nous rions, observons les moindres faits et gestes. Certains spectateurs n'hésitent pas à se déplacer pour changer d'angle de vue notamment lors du concert où Cristal semble se jeter à corps perdu dans le rock (magnifiques comédiens ? rockeurs ? musiciens !). Je bouge peu comme intrigué par ce que je vois et entends. Et pourtant, je ne cesse de bouger dans ma tête : est-ce du théâtre ? de la danse ? un concert Rock ? En fait, l'histoire de Cristal prend sens à partir du regard que je porte sur elle. Je peux y voir ce que je veux. Par cette prouesse artistique où nous passons du réel à l'imaginaire, Gildas Milin m'envoie de beaux anti ? bêta ? bloquants qui donne à l'ensemble un aspect euphorisant, ouvert et me positionne comme spectateur actif. Au bout de deux heures trente d'un spectacle mené tambour battant, je sors quelque peu sonné, mais heureux d'avoir assisté à une ?uvre « politique » en ces temps de perte de créativité dans les milieux médiatico ? politique.
Arrivé au parking, cinq membres d'une équipe petite enfance que j'accompagne comme consultant dans une collectivité m'interpellent. Elles sortent d'un repas où elles ont travaillé leur réseau. Je n'en reviens pas de cette coïncidence. Face à l'incertitude, au complexe, elles répondent par le collectif, le transversal et le projet. J'ai rencontré les « femmes de juin »?

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« L’optimisme, c’est le KunstenFestivalDesArts lui-même ».

Elle fut à l’origine de ce blog lorsqu’elle m’a suggéré en mai 2005 d’écrire mes analyses sur les nombreux spectacles que je voyais. Un an plus tard, un « pass » à la main, elle arpente les lieux du Kunsten à Bruxelles pour se forger une idée sur la création contemporaine. Elle a d’ailleurs écrit pour le blog. Tout est lié?C’est donc avec Peggy que « Le Tadorne » commence une série d’interviews de spectateurs pour dresser le bilan des festivals. Elle inaugure celui du KunstenFestivalDesArts. Et puisque nous sommes sur un blog, c’est un dialogue à deux voix qui vous est proposé en direct d’un café de Bruxelles?

 

Le Tadorne : Une image de ce Kunsten ?

 

Peggy: Je revois cette grande scène lors du spectacle de Bock&Vicenzi où chacun vaque à ses occupations. C’est une image irréelle, hallucinante quand j’y repense.

 

Le Tadorne : Je nous revois tous les deux couché par terre lors de la première journée du Kunsten lors de l’exposition – vidéo de Yan Fudong. J’étais épuisé et je me souviens d’un rêve éveillé alors que les images de l’expo m’entouraient. Le Kunsten, c’est aussi cela?Un rêve éveillé.

 

Le Tadorne : Une émotion liée au Kunsten ?

 

Peggy: Toujours le spectacle de Bock&Vicenzi ! Je ne peux pas oublier mon énervement au cours de la représentation. Et pourtant, ce spectacle fut une bombe à retardement une semaine après. Encore aujourd’hui, dès que j’y repense, j’ai des émotions très variées.
Comment ne pas évoquer mon fou rire lors de « Lugares comunes » de Benoît Lachambre ? La scène où quatre comédiens se moquent du langage du marketing m’a provoqué une crise de rire mémorable ! D’ailleurs, j’ai souvent ri au cours de cette édition. Plusieurs fois, je me suis dit : «  mais comment osent-ils faire cela ? »
Je repense aussi à deux jolis spectacles : « Penthesilea » de Françoise Berlanger et «  Hier ist der apparat » de Chris Kondek . Ce sont deux ?uvres qui m’ont tout simplement fait du bien.
Le Tadorne : oui, j’appelle cela les spectacles « réparateurs » quand on est bousculé lors d’un Festival.Il en a manqué cruellement en Avignon l’été dernier.
J’ai été pris moi aussi d’un fou rire avec toi lors de « Lugares comunes ». Mais ma plus belle émotion est le spectacle de Platel, «  VSPRS », où lors de la dernière scène, j’avais le ventre noué. Je vais d’ailleurs le revoir en Avignon, fin juillet.

 

Le Tadorne : comment  qualifierais-tu le projet du Kunsten ?

 

Peggy : J’ai l’impression que l’équipe du Kunsten a voulu me libérer. La thématique de l’aliénation a été omniprésente au cours de cette édition. Or, il se trouve que cela m’a libéré de ma propre aliénation, de mes cadres. C’est comme si les spectacles sortaient du contenu pour interroger, toucher le spectateur dans sa relation à l’art. Tout au long du Festival, je me suis ressentie actrice de mon cheminement. Avec le Kunsten, on s’éloigne d’une conception classique du spectateur qui consommerait passivement de l’art.
Autre exemple, quand je repense au spectacle de Meg Stuart « Replacement ». Entre l’excellent et le nul, il y a des ?uvres qui ne peuvent pas entrer dans ce clivage. On ne peut pas rejeter en bloc. Il se trouve que «  Replacement » m’a emmené à réfléchir ; je ne peux donc pas rejeter définitivement cette pièce. Le projet du Kunsten vise à nous guider vers un cheminement et à sortir du ponctuel, du factuel.
Le Tadorne : J’ai eu l’impression que le Festival d’Avignon, édition 2005, se poursuivait. A la différence notable : si la France se déchire autour d’un choix entre théâtre et danse (texte ou pas !), ce clivage n’est pas du tout d’actualité à Bruxelles. Le projet du Kunsten vise à nous décloisonner. J’ai ressenti très fortement la pensée d’Edgar Morin, comme je l’écrivais précédemment dans un post.

 

Le Tadorne : quels sont les spectacles qui sont passés à côté du projet du Kunsten ?

 

Peggy: Sans hésitation, «  Swing » de la compagnie «De Parade ». Je suis resté passive face à cette création. Également,le spectacle du chorégraphe suisse Thomas H
auert « Walking Oscar  » n’a pas été à la hauteur. Il y a une exigence de qualité dans le projet du Kunsten. Il ne suffit pas d’avoir un nouveau concept. Encore faut-il le faire partager.
Le Tadorne : Je partage ton analyse concernant l’articulation entre un concept et le projet. A ce titre, «  Marseille#10 » de Roméo Castellucci et « Quantum » de Brice Leroux se sont enfermés dans leur concept alors qu’il y a une forte exigence d’ouverture au Kunsten.

 

Le Tadorne : quel est le spectacle qui t’est apparu le plus à l’avant-garde ?

 

Peggy: c’est «  sx.rx.RX » de Patricia Allio. Ce spectacle était le c?ur même du projet du Kunsten. Voilà comment à partir de l’aliénation du personnage principal, Patricia Allio nous a invités à transcender nos clivages, à dépasser nos peurs, nos représentations.
Le Tadorne : Je suis absolument d’accord. Cette pièce va me marquer pendant longtemps. Il est quand même étonnant que cette oeuvre n’est pas trouvée de producteur en France et qu’elle soit absente du Festival d’Avignon cette année !

 

Le Tadorne : quel est le regard des artistes sur notre monde à travers le Kunsten ?

 

Peggy: C’est un regard dur, parfois pessimiste, mais l’optimisme, c’est le KunstenFestivalDesArts lui-même. Le cadre que pose la direction du Festival est tellement positif. On ne se permettrait pas cela en France ! L’affiche du festival en dit long : il y a un trou et à travers lui, on voit en fond l’affiche de l’exposition « Bing » qui a lieu actuellement au Musée de Bruxelles. S’ils voulaient communiquer sur la complémentarité, ils ne s’y prendraient pas autrement !
Le Tadorne : Effectivement, je vois mal le festival d’Avignon intégrer dans son affiche celles du « Off » ! Et puis, c’est étonnant de constater à quel point ils ont réussi à créer un lien fort entre flamand et francophones. On est loin de l’affrontement. Et que dire alors du lien avec le public ! Alors qu’au Festival d’Avignon les fêtes sont réservées aux V.I.P, au Kunsten elles sont ouvertes. C’est incroyable de faire la fête au sein du Théâtre National. Imaginerais ?t-on la même chose en France ? Le Théâtre National de la Criée transformé en boîte de nuit lors du Festival de Marseille!
Peggy : l’optimisme chez les artistes est à chercher dans les nouvelles formes artistiques qu’ils nous ont proposées pour lire autrement le monde. Christoph Marthaler avec «  Wich only » où le son ne passe plus par les mots, mais par la voix. Alain Platel avec « VRPRS » qui nous a subjugués en reliant le jazz, la danse, la transe et Monteverdi. Comment ne pas évoquer «  sx.rx.Rx » de Patricia Allio qui  a su donner aux paroles de Samuel Daiber, interné en Suisse dans les années cinquante, une forme incroyablement créative. Et puis bien sûr, «  Lugares comunes » de Lachambre qui par sa mise en scène, nous a offert une autre façon de voir l’espace du groupe.
Mais c’est Yang Fudong, avec son installation vidéo, qui nous a donné les clefs pour nous positionner dans ce monde si complexe. C’est lui qui nous a proposé le contexte le plus cruel du Festival. Et c’est lui, qui nous a offert les portes de sortie, la note d’optimisme.

 

Le Tadorne : comment as-tu vécu le fait d’écrire des articles sur le Kunsten pour un blog ?

 

Peggy: Le passage au « je » dans les cinq articles écrits pour « Le Tadorne » n’a pas été simple. Cela m’a parfois mis mal à l’aise par rapport à mon métier de journaliste. Mais comment évoquer un spectacle sans passer par le « je » ? Je pense que le blog est peut-être le média le plus pertinent actuellement pour décrire la relation entre le spectateur et l’art.
Le Tadorne : Je partage cette analyse. Le blog est sûrement une excellente école pour le spectateur (plus j’écris, plus je vois les spectacles autrement). Pour le journaliste, écrire pour un blog lui permet de repasser par le « je » pour restructurer son regard par rapport au monde, à l’art. J’aimerais tant que Fabienne Arvers des «  Inrocks » accepte d’écrire pour mon blog. Cela l’aiderait à se rapprocher du public tant ses critiques de spectacles me paraissent décalées. Et puis, cela me permettrait d’apprendre par son regard.
Pour autant, le Kunsten n’a pas intégré la blogosphère dans son projet. On aurait pu imaginer qu’un des membres du staff tienne son blog ou qu’ils répondent aux deux mails que je leur ai envoyés !!

 

En tout cas, merci Peggy pour tous ces échanges au cours de ce mois de mai. J’ai beaucoup appris à partir de ton regard, lui aussi décalé.
Très kunsten, comme positionnement…

 

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Benoît Lachambre avec “Lugares Comunes” clôture ouvertement le KunstenFestivalDesArts.

Pour cette dernière soirée, le KunstenFestivaldesArts de Bruxelles nous propose  « Lugares comunes » de Benoît Lachambre, chorégraphe originaire de Montréal. En 2004, au Festival d’Avignon, j’avais apprécié « Forgeries, love and other matters » mais qui avait laissé perplexe le public, déboussolé par sa danse conceptuelle !
Au Kunsten, le contexte est différent. Le public semble prêt à accueillir l’étrange, le décalé, le complexe. Ce soir, au Kaaitheater (le théâtre flamand de Bruxelles), l’ambiance hésite entre la morosité (il pleut dehors ; c’est le dernier spectacle du Festival) et l’envie de la faire la fête (à minuit, le Théâtre National de la Communauté Française est transformé en boîte de nuit pour la clôture).
Dans la salle, la scène me paraît immense. Assis, je constate que je peux étaler complètement mes jambes. Il y a de l’espace comme s’il existait un lieu commun entre les artistes et le public. Savourez la transition…Car,
« Lugares comunes » évoque l’espace à réinventer pour créer d’autres liens sociaux, pour sortir de la dictature rampante de l’individualisme.

Ils sont neuf sur scène coiffés de perruques grisonnantes. Ils sont assis dans des sièges noirs, très fonctionnels au design digne d’une salle d’un Conseil d’Administration de Clearstream. Ils se lèvent progressivement et leurs pas se font de plus en plus saccadés. Comme chez Alain Platel, la transe fait la danse. Les comportements frôlent la folie. Cela fait mal aux corps. Il s’agit alors de se regrouper pour tenter de dialoguer, mais rien n’est possible. L’important n’est pas d’écouter, mais d’affirmer ses arguments. Le débat n’est qu’illusion. On se croirait dans une émission d’Arlette Chabot, la directrice de l’information de France 2, célèbre spécialiste de la question qui clive ! Il faut donc réinventer l’espace entre eux et nous. Dans cette recherche d’un lieu commun, Benoît Lachambre semble vouloir nous associer. Il cherche avec nous. Cela tombe bien, je sens ses artistes si proches de moi que rien, de leurs faits et gestes, ne m’échappe. Plus je les observe, plus je crée moi aussi cet espace. C’est une sensation nouvelle!
Ainsi se succèdent plusieurs scènes où ces neuf danseurs – comédiens (tous magnifiques) tentent de créer le lieu commun, celui où toute leur créativité peut s’exprimer dans le non-jugement et loin des conventions du marketing (la scène où quatre d’entre eux semblent mimer le langage de la publicité est hilarant !). Et puis, deux instants purement magiques m’emmènent symboliquement sur scène. Sur la droite, trois femmes sur un podium lisent une magnifique poésie sur une musique entraînante, tapant la mesure avec leurs doigts. Au même moment, l’espace se transforme et deux trios investissent d’autres lieux où deux hommes et une femme se tiennent par la main, assis, n’échangeant que par la force de leur lien. A ce moment précis, la chorégraphie est de toute beauté alors que les corps bougent peu. Emerge ainsi la force de « Lugares communes »: ouvrir notre regard sur le collectif transversal, au moment où les sociétés se communautarisent. Lachambre nous aide à repérer le lien créatif au détriment du lien qui clive. En choisissant de faire parler les comédiens dans une langue inconnue que nous ne comprenons pas, ils nous invitent à sortir du langage qui enferme pour nous ouvrir sur le lien qui complexifie. Cette pièce a eu des effets trois jours après. Signe que Benoit Lachambre m’a touché. Quelque part au niveau du vécu.

Je vais fêter ça…

Vous avez vu ce spectacle? Nous vous invitons à participer au palmarès du blog Scènes 2.0 en votant ici!

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Romeo Castellucci amarre le KunstenFestivaldesArts à Marseille.

 
  Mon initiation à l'univers métaphorique de Roméo Castellucci se poursuit. Après les deux derniers épisodes joués au Festival d'Avignon en 2005, Bruxelles et Berlin, qui m'avaient fortement impressionné, je décide de persévérer cette année au KustenFestivaldesArts de Bruxelles.
Ce metteur en scène italien s'est donné comme pari un peu fou d'écrire dans dix villes différentes une tragédie. Point de texte, tout est suggéré à partir de métaphores (lumières, personnages irréels, décors mobiles). Après un temps passé à Marseille, Castellucci nous présente le dixième épisode avec toujours le même tissu opaque entre les comédiens et nous, pour nous aider à changer la perception. « BR.#0
4 Bruxelles» m'avait glacé, « B.#03 Berlin » m'avait ennuyé, « M.#10 Marseille » me déçoit. En Europe, Marseille est une ville qui peut inspirer la tragédie. Or, Romeo Castellucci semble être amarré au port, presque plongé dans un univers aquatique. J'ai l'impression de couler en voyant tous ces panneaux du décor monter et descendre. L'intensité de la lumière baisse progressivement comme lorsque sous l'eau le temps se met à changer. À peine sort-on de l'eau que l'extérieur est hostile, invisible. Point de comédiens sur scène, tout est suggéré par le son, la lumière, la vidéo et les éléments du décor. Comme lors des épisodes précédents, l'apocalypse fait un bruit du tonnerre et provoque des sursauts et autres clignements de paupières.

Un nouveau monde apparaît alors. Une cantatrice arrive et chante devant la scène où le chaos produit ses effets sur un écran vidéo. C'est beau, mais je ne suis pas touché. Tout est à distance comme si Castellucci avait eu peur de Marseille, aveuglé par la lumière, par la religiosité de cette ville. Je sors de cet épisode avec le sentiment que, décidément, Catellucci ne me touche pas avec son théâtre d'ombres, de sons et de lumières.
J'espérais une émotion avec
« M.#10 Marseille ». Amoureux de cette ville, je me sens bien éloigné de ce Roméo, coincé dans le quartier de La Joliette?

Photo : © Annelies Tollet ? Academie AnderlechT.
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Brice Leroux avec « Quantum » fragilise le public du KunstenFestivaldesArts.

En arrivant à la Raffinerie de Charleroi, bel endroit dédié à la danse, nous sommes prévenus : « cette pièce est fragile ; il ne doit y avoir ni bruit, ni lumière. Les GSM doivent être impérativement éteints ». Une ambiance de recueillement règne dans la salle comme si personne n'osait bouger et parler. Sur scène, le rideau est comme en aluminium ; il nous renvoie notre propre image. La lumière baisse pendant qu'un grondement se fait de plus en plus sourd. Ils sont cinq, habillés en noir mais leurs bras sont blancs. Progressivement, nous ne voyons qu'eux. C'est hypnotisant et me voilà plongé dans un autre univers. Il n'y a pas de musique et je ne bouge plus, de peur de faire du bruit (trois personnes autour de moi n'ont pas cette délicatesse?). Chaque danseur dessine avec ses bras des formes carrés. J'assiste alors à un ballet de mouvements assez jolis. Je me mets à rêver de les voir s'entremêler pour créer un univers poétique. La suite brise cet espoir. Je suis immergé dans un environnement plus proche de la physique que des sciences naturelles ! Les bras dessinent des formes en W, en V mais il n'y a pas de O? Cela devient mécanique, les gestes sont systématiques et je suis loin de la systémique ! Puis, au hasard d'une forme, je m'imagine dans un flux de communication mais le W revient?
Le concept a-t-il de l'avenir ? S'il s'agit d'aller dans l'univers de l'infiniment petit, de la physique, qu'est-ce que cela peut bien m'apporter si je n'en retire pas le sens. La tache du chorégraphe est immense : non content de trouver la forme, son travail est toujours évalué sur le fond, sur le sens, voire même sur le sens du sens ! C'est le philosophe des temps modernes. Or, Brice Leroux semble avoir transposé des lois de la physique à une chorégraphie pour bras en oubliant que nous étions là. Il ne suffit pas de nous renvoyer à notre propre image (les danseurs restent derrière le « miroir » lors des applaudissements) et de prendre une partie du corps pour expliquer le tout. Il ne suffit pas, à partir de ce miroir, de nous inviter dans notre propre infiniment petit. Encore faut-il porter un message puissant qui puisse nous dispenser de la globalité du corps d'un danseur. Sur ce point, Brice Leroux devrait abandonner ses livres de physique et lire Edgar Morin, sur la théorie de la complexité.
Cela donnerait à « Quantum » sa part d'humanité.
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Jean Genet par Antoine Bourseiller : c’est du lourd.

Je mets les pieds pour la première fois dans ce joli théâtre parisien. « L’Athenée » accueille une production du sud (Théâtre National de Nice) pour une pièce qui divise les critiques : « Le bagne » de Jean Genet mise en scène par Antoine Bourseiller se joue pour la dernière fois après un mois de représentations. Le théâtre n’est pas plein et je suis installé au troisième rang. Ce détail a de l’importance. Bourseiller vient nous parler avant le début de la pièce. Il la replace dans l’histoire de Genet et nous invite (« éventuellement ») à faire une ovation à l’issue du spectacle pour saluer la fin de l’épopée. Cette intervention n’apporte rien, mais cela semble lui faire tellement plaisir. Douterait-il de notre jugement?
Le rideau se lève. Le décor, sur des roulettes, est à deux faces. Il est imposant et très massif sur cette petite scène. C’est une prison. Sur le toit, les policiers voient tout, le doigt sur la gâchette. Mais ils jouent aussi le soleil et la lune pour nous éclairer sur la dualité complexe des personnages, entre ombre et lumière, entre masculin et féminin. Sur scène, le Directeur, l’aumônier-économe et Marchetti, le plus beau gardien du bagne. Ils ont à eux trois main mise sur les neuf bagnards. Séduction, coups tordus, violence physique et verbale ponctuent les rapports entre ces hommes que tout oppose, mais dont le lien s’avère indestructible tant il est ancré dans des jeux pervers. L’arrivée d’un nouveau bagnard, Forlano, déstabilise ce bel équilibre. Tout au long de l’histoire, nous ne l’entendons presque pas, mais ses gestes et postures en disent long sur ses intentions. Il est l’enjeu du pouvoir entre deux autres bagnards (Rocky et Ferrand) qui se livrent aux plus basses stratégies pour conquérir ses faveurs. L’assassinat de Marchetti envoie Forlano à la guillotine (le Directeur ne s’embarrasse pas d’un procès !). Vous l’aurez compris, la pièce de Genet se joue en eaux troubles. Les dialogues sont inégaux (est-ce sa plus belle oeuvre?) ; certaines scènes prennent à la gorge (lorsque le gardien présente Forlano à ses compères ou quand les bagnards refusent à tour de rôle d’étendre le linge !).

Mais la mise en scène n’est pas à la hauteur de la complexité de la situation et des personnages. A l’image du décor trop massif, les épisodes s’enchaînent avec lourdeur comme si Bourseiller traînait un boulet. Les comédiens semblent aussi prisonnier d’un jeu où la séduction, l’ambiguïté empruntent parfois les codes de la culture gay actuelle. En les cantonnant dans des cases (c’est le cas de le dire), nous n’avons que rarement une vue d’ensemble des jeux entre les protagonistes. Bourseiller a donc choisi d’ajouter au poids du décor, le cloisonnement entre les acteurs. Est-ce bien nécessaire ? Cette pièce aurait mérité une scène plus longue avec un décor moins haut (comment regarder la lune et le soleil alors que les comédiens jouent en bas !). J’ai surtout l’étrange sensation que la mise en scène ne s’inscrit pas dans un contexte. Si Genet passe sous silence l’aspect politique du bagne, Bourseiller aurait pu replacer la pièce dans un contexte historique (certes la France n’a jamais fait ce travail d’introspection ; il aurait pu le faire). Au final, cette pièce ne mérite pas certains commentaires excessifs entendus à la sortie (« C’est à chier ! »).
Pour ma part, c’est une transmission à la jeune génération de metteurs en scène qui, moins complexée, donnera à cette œuvre de Genet une fluidité capable de l’ancrer dans l’histoire de la France et du Théâtre.

 

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Tragédie en Arles avec Caterina et Carlotta Sagna

 
 
 

Voir deux solos de deux s?urs chorégraphes dans la même soirée est un contexte pour le moins atypique. Quand l'une fait partie de la célèbre compagnie flamande «La Needcompany » (Carlotta Sagna), l'autre vole de ses propres ailes (Caterina Sagna). Toutes les deux nous présentent au Théâtre d'Arles deux pièces aux noms pour le moins étranges : « Transgedy » et « Tourlourou ». Une centaine de spectateurs a fait le déplacement, heureux d'être là. Nous sommes loin d'un public d'abonnés?
Le premier, « Transgedy » de Caterina est dansé par Alessandro Bernardeschi. Sur scène, un guéridon, une radio-cassette, et tous les ingrédients pour passer à l'heure de l'apéro. Une photo trône sur cette si petite table. L'homme fume puis se lève pour danser sur la musique des Bee Gees (« Tragedy »). Il danse sa solitude et je me sens dérouté. Rien n'est linéaire dans les gestes, tout est saccadé comme une vie qui perdrait le fil conducteur, le sens. Pendant plus de vingt minutes, j'assiste à la souffrance d'un homme seul, qui se jette à terre, pour se relever, souffrant, mythomane de surcroît (il se prend pour Shakespeare ? la photo, c'est lui !-). Et pourtant, je reste à distance, sans empathie particulière pour cet homme, comme si ma position ne faisait qu'accentuer sa solitude. Le final où il s'asperge de Ketch'up pour simuler un drame shakespearien frôle le pathétique. Mais loin du ridicule et du pathos, Caterina Sagna touche là où cela lui fait mal ; nous fait mal. Avec poésie.
Le deuxième solo (« Tourlourou ») dansé par Carlotta Sagna va faire l'effet d'une petite bombe dans ce si joli théâtre. Elle arrive, tutu vert et pointes au pied. Un petit plateau en forme de cible l'attend. Au cours d'un très beau texte, elle nous annonce qu'il ne lui reste que dix minutes à vivre. Une autre tragédie se joue devant nous (on n'est quand même pas là pour rigoler ce soir?). Dans ce si petit espace, Carlotta Sagna va danser l'impossible à savoir le passage de la danse classique à la danse moderne, métaphore des transformations, des virages qui parsèment la vie. Je reste ébloui par ce corps qui se plie, se déplie, se lève, se couche alors que tout va se terminer dans quelques minutes. Le corps habite l'intensité dramatique comme je l'ai rarement vu en danse. A la voir se remettre à danser avec ses pointes, provoque en moi un élan d'émotion comme si le film de sa vie se jouait là, face à nous, dans cet espace si petit. Carlotta Sagna est au cours de ces trente minutes, plus qu'une danseuse. Elle est une artiste qui repousse les frontières de son art à l'image de la Needcompany, espace de création pluridisciplinaire basé à Bruxelles et animé par Jan Lauwers. « Tourlourou » est beaucoup plus qu'une « Transgedy ». C'est un petit chef d'?uvre d'humanité.

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