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Souvenirs deTaxidermie.

Le Merlan, Scène Nationale à Marseille, poursuit ses vagabondages dans l'attente de la rénovation de sa salle. Le rendez-vous est pris au petit Théâtre de  la Criée pour “Taxidermie” classée sous le thème « laboratoire ». Un chorégraphe (Martin Chaput),et un anthropologue (Martial Chazallon) se sont unis pour ce projet où la recherche sur quatre villes (Mexico, Montréal, Maputo et Marseille) s'articule à l'intime à partir d'objets récoltés dans chacune d'entre elles. Ce soir, Marseille se mêle à l'Afrique comme en témoignent les  vêtements et les animaux empaillés des deux continents posés sur les gradins ! Dès l'arrivée dans la salle, nous sommes invités à nous asseoir en face, d'où j'observe les couleurs et les formes de ces robes, chemises et autres bestioles ! Le dispositif bifrontal accentue la séparation des deux mondes, mais la scène fait office de passerelle.
Face à nous, trois danseurs (majestueux) interprètent un nouvel univers patiemment créé par le chorégraphe et l'anthropologue. Je ne comprends pas toujours là où ils m'emmenent, mais je ressens la puissance du projet de ce binôme atypique. Plusieurs séquences nous invitent à l'ouverture vers ce langage chorégraphique métissé, tel ce passage où ils dansent sans pouvoir s'appuyer sur leurs pieds et leurs mains. C'est alors que patiemment, ils prennent des allures d'oiseaux, voire d'humains à qui l’on aurait coupé les ailes. Ces gestes désarticulés sont beaux parce qu'ils trouvent leurs traductions dans l'imaginaire africain et européen. D'autres images me viennent quand ils dessinent à la craie sur le sol des gravures telles des peintures rupestres, ou les tags de nos villes. Ils jouent aussi avec les vêtements pour s'y camoufler, s'en faire une coiffe, et leurs gestes sont d'une précision que seul un anthropologue pourrait déchiffrer.Les voir s'échapper dans les gradins donne l'impression qu'ils quittent la ville pour la forêt, ou l'inverse.
Ce mélange de Marseille et d'Afrique crée un langage qui requiert un lâcher-prise continu parce qu'il parle àla fois aux sens, à l'imaginaire de l'enfance, aux expériences du réel. Ce croisement des disciplines est en cours, mais je ressens la création inaboutie. Trop d'images se succèdent sans que je puisse y déceler un apport qui les transcenderait. La transdisciplinarité ne fait pas une ?uvre d'art mais elle l'encourage.
Modestement, je soutiens cette démarche pour qu'émerge la fresque qui ne manquera pas de masquer ce joli puzzle.

?????? “Taxidermie” a été joué les 16 et 17 février 2007 par la compagnie Projet In Situ  au Petit Théâtre de la Criée dans le cadre des “vagabondages” du Théâtre du Merlan.

Crédit photo:  Michela Rufini.

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Au Festival Faits d’Hiver, l’autre histoire de Geisha Fontaine et Pierre Cottreau.

« Mains d'?uvres » est un lieu culturel ouvert, accueillant, niché à Saint Ouen. Il nous propose, à l’occasion du Festival « Faits d'hiver », un feuilleton en douze épisodes ( « Je ne suis pas un artiste ») concocté par Geisha Fontaine et Pierre Cotreau. Cela commence à 19 heures pour ne finir qu'à 7 heures du matin. Entre temps, dans le cadre du projet avec le festival, j'ai l'opportunité de mener quelques entretiens avec les spectateurs. Eric Boudet, le photographe de danse, peut projeter ses instantanés de la performance dans un espace intelligemment pensé par la direction de Mains d'?uvres.  
Le temps médiatique nous envahit peu à peu. Tout doit s'apprendre, se jouer dans une pression verticale inquiétante. Dans ce contexte, un collectif d'artistes composé de danseurs professionnels et d'amateurs, d'un groupe rock, d'ingénieurs géniaux du son, de chercheurs, ont décidé de décortiquer la notion du « beau », en prenant leur temps et donc le nôtre ! Trois danseuses font le lien pendant douze heures avec une centaine d'artistes disposant de deux espaces d'expression : au fond de la scène, telle une agora, et sur le plateau où le corps peut décliner la beauté sous toutes ses formes. Le dispositif est toujours le même : résumé de l'épisode précèdent par la chanteuse Alexandra Fleissher, une chanson, une danse par le trio, une vidéo, une danse avec les invités et, pour faciliter le passage à l'épisode suivant, la phrase culte : « Mais ça, c'est une autre histoire ».  
Alors, d'épisode en épisode, stylo à la main, j'ai glané ici et là les paroles du public. Une prouesse aussi pour le bloggeur quand il faut mener une interview à cinq heures du matin. Une performance pour le lecteur de ce blog qui va devoir s'immerger dans un processus auquel il n'a pas participé. En huit tableaux, je vous propose les mots de ce public performant. A nous d’en faire une fresque. Mais ça, c’est une autre histoire…


S'ouvrir à la coconstruction.

Après le deuxième épisode, Fabienne ne veut pas « forcer sur sa résistance ; j'ai besoin de douceurs actuellement. Il est 21 heures et je tiendrais le temps qu'il faut, mais qu'importe la durée. Ma réflexion sur la beauté va se construire avec eux. Je me sens chercher avec ces artistes ; c'est ouvert, c'est accessible. Je ne me sens pas rabaissé ». Fabienne ne sera plus là à sept heures du matin. Qu'importe, son ouverture me donne son regard. C'est beau.

La nouvelle vague.
Déjà trois épisodes. Agnès a « besoin de ce temps que la performance nous offre. C'est précieux, douze heures pour nous aider à réfléchir sur le beau. On nous présente toujours des formats courts, pariant que le public peut toujours tout comprendre en une heure. Ce soir, j'ai envie d'une proximité avec les artistes même s'ils sont encore dans la représentation. Il faut attendre encore un peu pour qu'ils me relient à eux. Pour l'instant, je les ressens encore trop dans leur communauté ». Agnès définit peut-être les nouveaux enjeux de la création contemporaine. La danse pourrait s'en emparer. Elle va le faire. Beau programme.

La déconstruction bouillonnante.
Déjà quatre épisodes. C'est la pause dîner. Elle va partir et je n'ai même pas le temps de lui demander son prénom. Elle est occupée, trop occupée. Pourtant, avec mon stylo, je note, j'interroge? « A l'issue des quatre épisodes, le questionnement sur la beauté prend forme et puis ce garçon (François Chaignaud en photo ci-dessus et dessous!)  qui se travestit est extraordinaire». Je n'en saurais pas plus. Elle est partie. Ce danseur quitte aussi «Mains d'?uvres » avec son sac et sa bouilloire (il a osé danser avec elle). Il laisse sa place à d'autres invités. Et pourtant?Ce danseur a porté les quatre premiers épisodes en déconstruisant nos images figées sur la beauté. Avec sa bouilloire électrique, il a donné aux gestes les plus banaux de la vie quotidienne une dimension  pour le moins troublante.


Du dedans au dehors.
Au cours du cinquième épisode, « Je ne suis pas un artiste » secoue le milieu de la danse. Laurence Louppe entre dans la caricature avec David Monceau, jeune danseur acrobatique (photo ci-dessous). L'enseignement vertical devient horizontal. Lequel des deux est le plus souple ? Ce duo est sublime, assurément. Et pourtant?Véronique « n'y est pas. Entre le discours et ce qui se passe sur scène, il y a un élément qui m'échappe. Et puis la scène avec Laurence Louppe est terrible. C'est du mouvement sans rien. Je ne comprends pas. C'est trop tendu, trop fait. Il n'y a pas assez de second degré ». Elle dedans, moi dehors, je ne comprends plus. Au moment où David et Laurence se transmettent l'énergie du beau, Véronique est sous contrôle.


Du bouillonnant au brouillon.
Les 6e et 7e épisodes m'engloutissent. Sur scène, on s'amuse à chercher « la plus belle danse ».

Ce retour au « plus » et au « moins », à cette binarité, m'empêche quasiment d'aller vers le public. Le bloggeur est sous contrôle.


Les mots bleus.
Manuel répond à mes questions et puis un blanc. Alors, il me regarde et me dit : « A chaque épisode, il y a un mouvement où c'est beau. La performance est dans ce moment là ». Dans toute recherche, il y a la parole de l'autre qui vous redonne le sens au moment où vous l'aviez perdu. Manuel a de beaux mots.

Unicolore.
Il y a cette scène où les deux danseuses mâchent et s'amusent avec du chewing-gum. Il y a ces ballons gonflés a
vec le souffle des danseurs. Tout aurait pu avoir la même intensité que l'épisode de la bouilloire. Mais voilà?Lou, amère, constate que « tous ces gestes sont faits, mais ils ne sont pas vécus à l'image de ces ballons dont elles ne font rien ». Le trio  est pris entre les invités qui font le corps de la pièce et le groupe musical qui pose le contexte avec créativité. Il
essuie les critiques. Le rose des vêtements des trois danseuses n'y fait plus rien : on les voit trop ou pas assez. Beauté fatale.

Arc-en-ciel.
4h45. Véra est sous l'effet d'une drogue. Le rose fait ses effets : « Je ne suis pas capable de savoir dans quel épisode nous sommes. Sous l'effet de la fatigue, le contrôle mental ne marche plus. J'avais une attente au début de la performance. Elle ne se joue pas, comme dans la vie. On ne se sait jamais ce qui va se passer ». Elle est accroc, mais je n'ai pas eu la dose suffisante pour l’être.
Le 11e épisode a un effet hypnotique. On nous l'assure, « le beau est grec ». Mais surtout, le grec, joué par Alexandre Théry, est drôle. On ne sait plus dans quelle époque épique nous sommes, le beau traverse la mythologie pour venir se nicher au c?ur de nos cerveaux anémiés. Comme me l'avouera Françoise « Je n'ai pas envie de lâcher. Il n'y aura pas de fin. Cette linéarité en douze épisodes ouvre ».

Sept heures du matin. Paris s'éveille. « Je ne suis pas un artiste » fera ses effets. Je ne sais ni quand, ni comment. La danse a trouvé là ses ouvertures complexes, à l'articulation de nombreux chemins dont on ignore où ils peuvent nous mener. Geisha Fontaine et Pierre Cottreau sont à coup sûr des visionnaires. Reste maintenant à habiter le trio des danseuses (métaphore de la danse actuelle ?)  pour que le « beau » ne soit plus simplement une question, mais un courant artistique transdisciplinaire.
Mais ça, c'est une histoire à construire ensemble.


Photos non libre de droit; pour de plus amples informations, contactez Eric Boudet.


?????? “Je ne suis pas un artiste” de Geisha Fontaine et Pierre Cottreau a été joué à “Mains d’Oeuvres” les 13 janvier et 3 février 2007 de 19h à 7 h du matin dans le cadre du Festival “Faits d’Hiver”.

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Matrikis d’Abou Lagraa: je me souviens.

Je me pince pour vérifier que je n’ai pas rêvé. Je scrute autour de moi pour me rassurer. Certaines femmes dans le public sont médusées. Je suis au Théâtre des Salins de Martigues pour « Matri(k)is » du chorégraphe et « scénographe » Abou Lagraa et je n’en reviens toujours pas. Comment est-ce possible ? Où suis-je pour voir une œuvre aussi…les mots me manquent.
Tout commence par un duo d’hommes et une femme qui les observe (métaphorisée par une vidéo projetée sur des voiles suspendues). Ils sont jumeaux et baignent dans un univers aquatique. Ils gesticulent, se cherchent, s’éloignent, se rapprochent, s’enlacent, …Rien. Le vide. Beaux corps luisants. Je m’endors.
Pause de dix minutes pour retrouver mes esprits.
Elles sont huit. Un octet. Une ode à la femme. Pute, soumise, idiote, avec capuche ou sans (c’est au choix). Une scène pour la danse de l’ « octet » (sic), un lit penché pour la « catin », des envolées pour la « féminité », des désarticulations pour le côté « danse contemporaine », des murmures pour des potins tellement féminins. Elles gesticulent, se cherchent, s’éloignent, se rapprochent, s’enlacent…Je bouillonne. Où suis-je ? Dans quel pays ? Où est la femme ? Celle que fait danser avec tant de forces Michel Kéleménis ? Celle que magnifie Russell Maliphant dans «Pusch» ? Celle qui résiste avec Héla Fatoumi dans «Wasla» ? Celle qui combat dans «K 626» d’Emmanuel Gat ? Celle qui vous enveloppe dans « Jeux d’intention » de Raphaëlle Delaunay ? Celles qui vous déshabillent dans « Belladonne » ? Ne cherchez pas, Abou Lagraa ne connaît que la femme des clichés, celle qui ne peut rien changer, rien complexifier et surtout pas les mouvements de son corps. Elle est enfermée dans des gestes tellement linéaires qu’on a envie de hurler pour la libérer.
Femme, je vous aime.

♥ "Matri(k)is" d’Abou Lagraa a été joué au Théâtre des Salins de Martigues les 1" et 14 février 2007.

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Electre par Philippe Calvario : joliment décalé.

On ne l'écrira jamais assez. Le site de Chateauvallon est exceptionnel même par temps gris. Ce lieu est empreint d'histoire et semble retrouver le chemin du renouveau. C'est dimanche, il est 15 heures et les séniors sont au rendez-vous pour « Electre » de Sophocle mis en scène par Philippe Calvario. Assis au premier rang, je scrute attentivement ce décor qui symbolise tout à la fois la modernité (l'éclairage, une scène au sol, une à l'étage) et la tradition (les murs blancs d'une vieille bâtisse grecque). Alors que la pièce n'a pas commencé, mon regard ne cesse d'aller d'un élément à l'autre. Ce n'est qu'un début?
La troupe féminine est impressionnante : Jane Birkin dans le rôle d'Electre est entourée d'un ch?ur de sept femmes mycéniennes tandis que les personnages masculins marquent par leur charisme. Si le jeu de Birkin étonne et dérange parfois, c'est le ch?ur qui porte cette mise en scène. Il joue l'absence pour mieux appuyer la présence des acteurs et se métamorphose à mesure que la vengeance finale approche. Cette approche par la voix et les c?urs est merveilleuse par instants, décalée souvent. Philippe Calvario semble  hésiter en permanence entre la volonté de s'affranchir de certains codes du théâtre et le respect des formes classiques dévolues à ce répertoire. Si bien que l'ensemble manque de fluidité, de mise en mouvement malgré l'engagement des acteurs. J'ai la sensation que le ch?ur sert de faire ? valoir alors qu'il aurait pu être liant avec tous les éléments de la mise en scène.
Le corps d'Electre est enfermé là où Calvario aurait pu l'ouvrir à partir du ch?ur. Au final, sur la durée, Jane Birkin semble s'effacer comme si tout était trop lourd pour elle. J'applaudis le jeu tout en regrettant la timidité d'un théâtre français qui a du mal à s'autoriser d'autres espaces, d'autres champs artistiques. Programmons l'exil artistique en Belgique !

?????? “Electre” par Philippe Calvario a été joué du 8 au 11 février à Chateauvallon.

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Konnecting Souls de Franck II Louise: deconnecting people.

Après « Drop it » vu au Festival d’Avignon en 2001, je suis curieux de retrouver Franck II Louise qui avait su chorégraphier avec créativité la place de l’individu dans le groupe à partir de la contrainte. Cinq années plus tard, le Wi-Fi et les nouvelles technologies envahissent le plateau et les corps pour une danse « Hip hop » dématérialisée. « Konnecting Souls » va me transporter pendant une heure dans un Second Life ennuyeux.
Quatre danseurs dont une femme occupent timidement la scène. Deux sont bardés de capteurs de mouvement reliés à une interface musicale pour composer la lumière et la musique en direct. Nous sommes dans l’ère de la cybernétique, où l’immédiateté prend le pas sur la réflexion, où tous les rêves sont possibles, même de créer « un orchestre de danseurs ». L’idée paraît géniale, à l’image d’un chemin qui se fait en marchant.  Pourtant, je ne ressens que de la contrainte et le peu de créativité s’exerce dans un lien de dépendance. La musique est inaudible, la danse se limite à des mouvements mécaniques reliés exclusivement à la technologie. Les danseurs n’arrivent même pas à s’en affranchir : un homme, tel un enfant, essaie de jouer avec un objet, mais les gestes tombent à plat comme s’il n’habitait pas son corps. « Konncting souls » est un hymne à la verticalité, à la dépendance, au pouvoir masculin. Franck II Louise a du talent pour brancher des fils invisibles, faute de créer des liens. C’est une œuvre triste pour nous préparer à vivre dans un monde dématérialisé.
Cette vision pessimiste cache plutôt l’absence de réflexion à long terme sur le lien social. On ne peut pas tout attendre de la danse…

♥ "Konnecting Souls" de Franck II Louise a été joué à la Scène Nationale de Cavaillon le 9 février 2007.

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L’impossible double deux de Gilles Jobin.

Clairement, "Double deux" de Gilles Jobin relate l’impossibilité d’être à deux : 
1 – «Je souffre de solitude»
2 – «Je me jette aux pieds de la première / du premier venu(e)»
3 – «Je te prends, je te jette»
4 – «Je te jette»
5 – «Je veux te modeler selon mon désir»
6 – «Je te prends, je te prends »
7 – «J’ai honte, je suis malheureux, plus malheureux encore qu’avant, je souffre ».
Ce déroulé paraît avoir été couplé à des consignes chorégraphiques simples, travaillées sous la forme d’improvisations successives :
1 – «Je balaye du bras l’espace devant moi tête basse et je m’effondre»
2 – «Je glisse sur le sol en direction d’un autre danseur»
3 – «J’attire l’autre et je le repousse en marmonnant pour moi même»
4 – «Je le gifle. Partie de baffes généralisée»
5 – «Je contrains l’autre à faire certains mouvements»
6 – «J’expérimente tristement le répertoire complet du Kama-sutra»
7 – «Je quitte l’autre, puis à la manière de Münch, je hurle une douleur muette».
Tout semble facile et convenu. Les applaudissements des spectateurs du Théâtre de la Ville furent timides.
Pour ma part peut-être n’avais-je pas envie ce soir là de plonger dans univers houellebecquien. Pour autant, il semble que ces idées auraient pu être exprimées plus subtilement, sans faire appel au pathos. Les danseurs de Gilles Jobin auront au moins réussi à me faire partager leur déception.

Elsa Gomis – Paris.

Vous avez vu ce spectacle? Nous vous invitons à participer au palmarès du blog Scènes 2.0 en votant ici!


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♥ "Double deux" de Gilles Jobin a été joué au Théâtre de la Ville de Paris du 7 au 11 février 2007.

Crédit photo: Jean-Pierre Maurin.

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Paco Dècina, chorégraphe philosophe au Festival Faits d’Hiver.

Il est 17h30, au Théâtre de la Cité Internationale de Paris. Le public est nombreux pour assister à « Indigo », la dernière création du chorégraphe Paco Dècina. Le photographe Eric Boudet et moi-même semblons être les seuls à nous inscrire dans la continuité du spectacle de la veille (« Je ne suis pas un artiste ») qui nous a maintenu éveillé de 19h à 7h du matin. Le Festival « Faits d'Hiver » a donc de la suite dans les idées : après les douze heures d'une performance qui n'a cessé d'interroger le « beau », nous sommes prêts pour « Indigo », « la couleur profonde de la nuit quand celle-ci se prépare déjà secrètement à se teinter de pourpre » (Paco Dècina). Une heure avant le spectacle, je constate que le Théâtre organise un café philosophique avant et après la représentation. Du « beau » à la philosophie, il n'y a qu'un pas que je franchis avec enthousiasme. L'opportunité de relier le blog, le festival « Faits d'Hiver », un groupe de spectateurs philosophant sur la danse et un photographe est unique ! C'est ainsi que notre projet de médiation prend une nouvelle forme, inattendue et pour le moins excitante. Les passerelles stimulent !
Cette ouverture me tient éveillé tout au long d' « Indigo », chorégraphie tout en douceur et tout en longueur. Je suis hypnotisé, comme happé par ces six danseurs parmi lequel Orin Camus (photo ci-dessous). Il dansait la nuit dernière à 3h du matin lors de la performance « Je ne suis pas un artiste ». Sa présence est exceptionnelle,  intacte malgré la fatigue. Tout est décidément lié?d'autant plus que le thème du café philosophique animé par Bernard Benattar (philosophe du travail) porte sur la présence !
Nous sommes vingt-cinq, installés dans ce joli café. Le philosophe lance le débat : « C'est une pièce sur la présence de l'absence ». Cette entrée paradoxale stimule le groupe. Certains expriment leurs ressentis, d'autres, plus à distance, écoutent. La présence se joue autour des tables comme si « Indigo » continuait à produire ses effets. « C'est un spectacle qui nous donne beaucoup de place » et certains n'en reviennent toujours pas : « je reviens pour la deuxième fois pour vivre une expérience des sens. Paco Dècina laisse percevoir le corps. J'aime cette liberté. ». En effet, « Indigo » est « un hymne à la renaissance » qui laisse au spectateur une place, une liberté qu'il n'hésite pas à prendre (« Je me suis absenté souvent dans cette pièce » ; « je n'arrive pas à interpréter. Je suis entré dedans sans faire de lien »). Chacun interprète la présence (« sa dramatisation » dit l'un deux) dans toute sa complexité et les échanges s'emballent à propos du silence : « Dès le début, le silence m'a fait peur?La danse était certes très belle, mais je n'ai pas accroché ; j'ai perdu le fil ».
Paco Dècina n'oppose pas pour préférer le « tout » : « la présence se nourrit de l'absence » et « elle dépend de notre position ». Les moments de silence ont précisément pour fonction de permettre au spectateur d'être présent (« le silence permet de créer le lien entre le chorégraphe et le spectateur?Il nous fait toujours résonner ! »). À ce moment du débat, chacun de nous est interpellé. La tension est palpable. Je suis troublé après coup de constater que nous sommes en miroir avec « Indigo » qui suit le même cheminement ! Un recadrage est alors proposé : « A-t-on besoin de rationaliser ce spectacle ? Cela s'adresse aux sens, c'est tout ». Cette sentence remet en cause le principe du café philosophique. La réponse ne tarde pas : « L'enjeu ici n'est pas de cliver. La philosophie partagée permet de dépasser les clivages entre les concepts et les ressentis, les sens ».  Le cadre étant reposé, un spectateur précise que « l''homme est vu dans sa fragilité. C'est une pièce très féminine, où la danse dégage un érotisme troublant ! ». Le « féminin » permet précisément de sortir des clivages pour se centrer sur la relation. Or, nous ne sommes pas tous d'accord sur l'intensité relationnelle d'”Indigo”. Certains la jugent « trop esthétisante » quand d'autres relèvent des « mouvements habités, où le danseur va jusqu'au bout alors que d'autres sont vides ». Le « plein », le « vide » fait de nouveau débat avant ma provocation (involontaire !). J'évoque le solo final, laborieux à mon goût, un peu vide, comparé à la « stature » d'Orin Camus. Or, ce danseur n'est autre que Paco Dècina ! C'est alors que Bernard Bennatar reformule : « ce solo est à la limite du théâtral ». Comme au spectacle, cette phrase retentit comme un final subliminal.
Nous sommes alors prêts pour visionner les photos d'Eric Boudet. L'enthousiasme est palpable. L'image se relie aux mots. Magnifique.
« Indigo » est une passerelle : pour en ressentir toute la puissance, il faut oser aller d'une rive à l'autre. Osons.



Photos non libre de droit; pour de plus amples informations, contactez Eric Boudet.

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??? “Indigo” de Paco Dècina a été donné du 1er au 6 février 2007 au Théâtre de la Cité internationale à Paris dans le cadre du Festival “Faits d’Hiver”.

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Au Festival Faits d’Hiver, le public, ce héros.

S’ouvrir, communiquer, mettre en lien les regards du public, tel est le projet que nous poursuivons, Eric Boudet (photographe de danse) et moi-même, avec le Festival parisien « Faits d’Hiver ». Il y a quinze jours, nous étions accueillis pour les créations de Josette Baïz, de Brigitte Seth et Roser Montllo. Ce deuxième week-end s’annonce riche, à l’image d’un festival résolument orienté vers des propositions artistiques où le rôle du public est questionné. Nous revenons au studio « Le regard du cygne » dans le 20ème pour « le spectacle dont vous êtes le héros » par la CompagnieAndrophyne. J’interviewe quelques spectateurs avant la représentation. Personne ne semble faire le lien avec le titre de la pièce comme si plus rien ne pouvait surprendre ce public de connaisseurs ! Par contre, la présence du bloggeur étonne, fait sourire, interroge, intéresse. Les rendez-vous sont pris avec quelques uns. Seront-ils les héros de la soirée ?
Le dispositif scénique frappe par son inventivité : télévisions à terre et au mur, musiciens à droite, grande toile à gauche et divers objets tombants du plafond. Il y en a pour tous les goûts, tous les regards et j’imagine déjà une danse…pluridisciplinaire ! Très vite, nous voilà projetés dans l’univers de « Big Brother ».  Un homme à l’écran explique les règles du statut de l’intermittence à un ami qui semble ne rien y comprendre. Le spectacle débute avec ce héros des temps modernes et se terminera une heure après par un verre de vin offert au public sur la scène ! Entre ces deux moments, un groupe de huit artistes tente le tout pour le tout pour créer une œuvre déconstruite, où tout ne tient qu’à un fil avec des références appuyées à notre société médiatique en perte de sens. C’est un tourbillon de mots, de corps jetés à terre, de provocations, de souffrances et de solitudes, de paris fous gagnés et perdus, de tentatives réussies et d’échecs retentissants. En une heure, notre société est sur scène pendant que les artistes, toujours plus précaires, nous aident à rechercher le sens. Face à ce déluge, le public ne peut rester passif. Trois spectateurs (volontaires) sont tirés au sort pour venir sur scène. Après une sélection sans pitié aux critères aléatoires, un seul survit ! Il est tour à tour manipulé, laissé de côté, intégré dans la troupe puis menacé d’exclusion. On le métamorphose en «big brother » et semble y prendre plaisir, comme pris à son propre piège. On ne sait plus où donner de la tête. Notre monde est devenu complètement fou et notre « héros »  de la soirée s’en sort tant bien que mal. Les acteurs finissent éreintés, maculés de sang, mais l’art est toujours là, à travers cette fresque dessinée à partir des corps d’un artiste et du spectateur – héros!
Ce groupe de chanteurs – musiciens – plasticiens – danseurs est à l’image de sa musique (enivrante), de sa danse (« sculpturale ») et de ses décors (en mouvement permanent). La Compagnie Androphyne ne manque décidément pas d’idées et de talents dans cette société polluée par le temps  médiatique et obsédée par le contrôle.
Les spectateurs, une fois sur scène, un verre à la main, se laissent volontiers interviewer par le bloggeur, comme si l’exercice était cohérent avec le spectacle. Tommy, très inspiré, évoque un « existentialisme galvaudé, mais présent », une œuvre où «je retrouve les codes de mon imaginaire, de mon quotidien d’artiste. C’est une pièce qui va évoluer dans ses articulations ».  Cette évolution est d’autant plus évidente que le lien avec le public est ouvert : « On s’interroge,  on ne subit pas ; le parcours n’est pas fléché, il y a des parcours multiples. » affirme Christine. Ce sentiment est relayé par Yasmina qui note «une liberté corporelle très forte », là où Hélène voit « des lignes qui se croisent et se décroisent ». Cette pièce a des allures de conte moderne avec ses personnages étranges, telle cette meneuse de revue qui a fortement impressionné Evelyne par « sa distance extraordinaire à mener le jeu dans un espace aussi petit ». Nathalie y voit presque « une comédie  musicale » tant le jeu est ouvert. Mais qu’en dit le héros de la soirée ? Cyril est discret, étonné par mes questions. Il aurait aimé voir le spectacle !  À l’intérieur, il a tenté de ne  « pas être que spectateur. Il fallait que je fasse le maximum pour faire partie de l’ensemble » même « s’ils ont tout fait pour m’intégrer ». Véronique a pu réaliser le rêve de Cyril : être l’héroïne la veille, et spectatrice le lendemain. Elle répond avec gourmandise à toutes mes questions et finit par me lâcher :   « suite à cette expérience, mon regard a changé à la fois sur le détail et l’unité d’ensemble ». À les écouter, leurs actes n’ont rien d’héroïque. Je suis presque déçu.
Sofie me confie plus tard qu’elle n’a pas «eu de déclic » et qu’elle ne sait « jamais investi psychologiquement ». Au final, la fonction du héros semble perdre de sa superbe comme si tout se déverticalisait ! Il est donc temps de passer à autre chose, à d’autres représentations théâtrales, où l’artiste ne serait plus au centre de tout, mais en lien avec le tout.
On attend avec impatience le prochain spectacle de la Compagnie Androphyne pour redynamiser tous ces héros qui sont déjà fatigués !


Photos non libre de droit; pour de plus amples informations, contactez Eric Boudet.
♥ "Le spectacle dont vous êtes le héros" de Pierre – Johan Suc et Magali Pobel a été joué les 1er et 2 février au "Regard du Cygne" à Paris dans le cadre du Festival "Faits d’Hiver".

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Dimitri Jourde, danseur étoile du Kubilai Khan Investigations.

Le Théâtre des Salins poursuit son audacieuse programmation avec un nouveau voyage surréaliste : la rencontre de l'Asie, de l'Afrique et de l'Occident. La Compagnie Kubilai Khan Investigations propose « Gyrations of barbarous tribes », succès retentissant du Festival Off d'Avignon l'été dernier et dont nous avions fait l'écho sur ce blog. Je revois ce spectacle pour la deuxième fois, mais l'angle de vue est différent : la grande scène de Martigues accueille cette ?uvre imposante.
Ils sont neuf danseurs et musiciens du Mozambique, d'Asie et d'Europe venus créer un territoire où les arts et les cultures s'entrecroisent pour tisser un espace contenant capable de faire fonctionner notre imaginaire par un lâcher ? prise continu. Ce collectif nous invite à dépasser nos cloisonnements, à tracer nous-mêmes les chemins pour nous relier à ce nouveau continent. Le voyage est à la fois intérieur, sur la scène et cette alchimie est prodigieuse. Le Directeur artistique, Franck Micheletti, signe une ?uvre ouverte aux pays des sans-papiers persécutés.
Tout commence par ces cloisons dorées qui délimitent les territoires : chacun se cherche, prend appui puis se déséquilibre à mesure de leurs mouvements. Le contexte de l'Afrique est posé ou plutôt le regard que nous portons sur elle. Les luttes, les transformations (de l'homme vers la femme, de l'homme se comportant comme un chien, du singe vers l'humanité) accompagnent l'émergence de ce nouveau monde. Les musiciens (magnifiques) nous guident, tel un fil d'Ariane, au c?ur de la violence, du chaos. Rien n'est détourné, tout est retourné vers nous. L'énergie déployée est à la hauteur de l'enjeu : le fil, toujours prêt à se désintégrer, doit dépasser les cloisons. Pour cela, Franck Micheletti se repose sur la force du groupe métissé pour qu'elles se métamorphosent en fond du décor.
Cette émergence s'appuie surtout sur Dimitri Jourde, danseur exceptionnel dont le corps évolue à mesure de l'avancée du territoire: tour à tour à terre, en l'air, jouant à la balle, passant du singe à l'homme, cet homme est une rondeur à lui tout seul. Il est le processus du collectif, son aimant, son liant. Son corps plie toujours, mais ne rompt pas ; sa danse est le socle sur lequel le groupe peut prendre appui. Dimitri Jourde est un orfèvre, un humanitaire dont la mission serait de refaire le monde. Émouvant.
Le public du Théâtre des Salins salue avec ferveur la prouesse. Alexandra et Claire, à mes côtés, se souviendront longtemps de ce voyage. Je remercie publiquement Annette Breuil, la directrice du Théâtre, de nous proposer ces chemins de traverse dont Jérôme Bel (programmé la veille) et Franck Michelettti seraient les passeurs. Il faut un certain courage pour ne pas se laisser envahir par des voies uniques et choisir des itinéraires chaotiques. Le Théâtre des Salins est décidément une belle météorique.

Pascal Bély
www.festivalier.net

????? « Gyrations of barbarous tribes » de la Compagnie Kubilai Khan Investigations a été joué au Théâtre des salins de Martigues les 30 et 31 janvier 2007.

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EN COURS DE REFORMATAGE

Trois recommandations tadornesques!

Le Théâtre des Salins de Martigues fait l’évènement cette semaine en nous proposant l’image d’une France métissée ! A ne manquer sous aucun prétexte (la réservation, c’est ici!) les mardi 30 et mercredi 31 janvier, deux moments précieux :
La dernière création de Jérôme Bel, un portrait dansé au format particulier d’un dialogue entre lui-même et le danseur thaïlandais Pichet Klunchun.
– Un petit chef d’œuvre d’humanité proposé par la compagnie, Kubilai Khan Investigations,   « Gyrations of Barbarous Tribes » (notre photo).

Le Théâtre du Merlan continue sa programmation audacieuse avec "Cet enfant" de Joël Pommerat les….30 et 31 janvier 2007. Saluons la coordination entre les deux théâtres! Stupéfiant!

Toujours sous le signe de l’ouverture, le projet « Le photographe sort le bloggeur de sa toile » se poursuit les 2, 3 et 4 février dans le cadre du Festival Faits d’Hiver à Paris. Ne manquez pas la performance de Geisha Fontaine et de Pierre Cottreau (« Je ne suis pas un artiste") le 3 février de 19h à 7h du matin.
Nous vous attendons pour blogger !