Qui n’a pas songé un jour, au détour d’une folie du futile, tomber dans la mode? Du chiffon, des accessoires, de jolies personnes, du glamour, surtout du glamour. Et si l’image, si brillante d’une fausse réalité, était tout simplement un monde réfléchi et construit, qui nous initie cette année en Arles à la création d’un univers, sous un oeil maîtrisé, celui d’un certain Christian Lacroix. Enfant d’Arles, c’est aussi dans l’histoire de cette ville et de ses coutumes de vie des deux derniers siècles, que Christian Lacroix a voulu nous introniser à son univers. Il semblait nous dire “pour me comprendre, comprenez Arles“. Alors, à vous paroles d’archives d’Arlésiens, visions de Lucien Clergue et de Frédéric Georges (1863-1933). Racontez-vous !
Bienvenue au coeur de l’intime qui nourrit l’acte créatif, celui qui construit l’artiste. Visitons Christian Lacroix.
Laissons battre le coeur : Alain-Charles Beau.
Des clichés sombres en noir et blanc, classiques par leur esthétisme qui tente de nous introduire sans trop en dire dans le quotidien de travail de Christian Lacroix. Les collages muraux, le détail du bibelot qui enrichit la pensée, et le résultat. La robe, le décolleté, le modèle. L’homme a donné de lui. Et, j’ai fermé les yeux pour mieux me laisser transpercer par la bande de bruits de l’atelier Christian Lacroix. Qui es-tu ? Je t’entends et je te dessine maintenant.
Cloître Saint Trophisme: Richard Avedon, Katarina Jebb, Jerome Puch.
Respirons à pleins poumons. Nous croisons tour à tour Richard Avedon, avec la scandaleuse fable « En souvenir des regrettés Mr. et Mrs Confort » qui signa son génie en 1995, dans un portofolio publié dans le New-Yorker. On se retrouve tous en regard d’un des clichés dans notre inconscient collectif instruit du monde de l’image où nous sommes tous issus. On souffre, mais on adore.
Auscultons le corps. On se détend avec les polaroïds de Jérôme Puch, plaqués sur ce cube noir imposant, qui nous offre un formidable catalogue de la mimique de la photo festive. Au premier regard, on sourit, au deuxième on remarque l’ordre des photos. L’attitude est classée par comportement corporel. Au troisième, on est prisonnier des détails qui dévoilent les personnalités. Le polaroïd témoignerait-il donc du temps fuyant des défilés de haute couture ? Divertissant.
Fermons les yeux : Katarina Jebb.
Grands formats couleur rectangulaires verticaux
Si le propos lugubre, au travers de l’icône religieuse sacralisant la mode, est intéressant, j’ai été déçue de la mise en valeur des oeuvres avec un éclairage tout de même pauvre et un espace d’exposition à moitié vide. A mon sens, une lumière pieuse, tel le soleil en voile direct aurait sublimé le travail sur couleur.
Église des frères prêcheurs: Peter Lindbergh.
L’Eglise des frères prêcheurs est un site arlésien que j’affectionne particulièrement pour les expositions photographiques. Allez comprendre la résonnance du silence, ad repetitam, sur chaque cliché. La lumière grisée si blanche d’un lieu de recueillement. Et, cette année, Peter Lindberg en Dieu païen de la mode, chassé des pages étriquées de magazine pour dompter la pierre par ces regards qui vous avalent, par leur format gigantesque. Noir et blanc. Ces visages surdimensionnés qui scrutent. Ces gens, ces choses, criant leurs personnalités, surplombent nos existences, là, le temps de notre vision. Je suis dans le reflet du cliché et ne vois que ces yeux qui regardent l’abstrait d’ici. Je suis petite et tellement grande, forte de la justesse de la mise en espace. J’adore.
Diane Fonsegrive – www.festivalier.net