Comment le public du Pavillon Noir d'Aix en Provence peut-il applaudir à tout rompre une ?uvre aussi vide de sens ? Cela ressemble à un soutien amical envers un danseur longtemps collaborateur du chorégraphe marseillais Michel Kelemenis et qui était en résidence de création au 3bisF d'Aix en 2004/2005. Je ne fais donc pas partie du cercle.
Christian Ubl, avec « ErsatZtrip » me plonge dans un gouffre : comment écrire sur une esthétique qui ne veut rien dire ? Pour me sortir de cette impasse, je préfère revenir aux intentions de l'auteur: « ErsatZtrip est la première pièce de groupe de Christian Ubl, inventée avec ses collaborateurs. Elle rassemble danseurs et non-danseurs, sans hiérarchie des corps, ni jugement ou interrogation sur leur présence. Pour le chorégraphe, la représentation vivante est perçue comme un ersatz de la réalité, c’est-à-dire un espace de remplacement d’une certaine esthétique vivante, où l’interprète agit comme un filtre. L’artiste analyse ainsi sa propre expérience, sachant que, par définition, l’ersatz renvoie à l’idée de copie de moindre qualité, mais comporte également des notions fortes de progrès ou d’invention. Pour cette création, l’esthétique recherchée est à la fois plastique et énergétique, et de cet amalgame se dégage parfois un personnage qui interroge la figure d’un héros que nous avons tous aspiré à être un jour ».
La scène n'est pas la réalité : soit.
L'interprète, interprète. Soit.
La réalité n'existe pas : c'est le regard que l'on porte sur elle qui fait sens. Soit.
Quant au héros imaginaire, le réduire à une figure plastique et énergétique est quelque peu réducteur si l'on en croit la psychanalyse.
Christian Ubl enfile donc de jolies perles pour masquer l'absence d'un propos intelligible et intelligent. Pendant une heure trente, j'observe un ersatz d'?uvre chorégraphique. Les symboles envahissent le plateau sans qu'ils fassent pour autant sens. Les objets sont instrumentalisés mais ne sont jamais en lien, juste posés côte à côte. La danse n'apporte jamais une métavision de la réalité : les chorégraphies s'empilent les unes sur les autres, comme plaquées. En prime à ce folklore de « la branchitude », un danseur se met à chanter et s'affranchit de trouver la note juste (pour l'esthétique, je suppose !). Les scènes métaphoriques se succèdent sans aucune articulation entre elles. Un danseur tente bien d'accompagner le propos en le reliant à notre dure réalité: les slogans scandés pendant dix minutes n'ajoutent qu'une confusion bien peu créative (« trop de consommation » et autre « trop.. » comme autant de slogans politiques révolutionnaires). « ErsatZtrip » croit pouvoir emprunter certains symboles de la danse contemporaine issus des univers de Jan Fabre, de Jan Lauwers voire même de Roméo Castellucci. Ces « copiés- collés » font sourire : ils semblent posés par Christian Ubl pour ne produire que des effets esthétiques.
Au final, « ErsatZtrip » donne l'étrange impression de condenser, d'accumuler, de superposer, tout ce que la danse propose actuellement. Cela ne fait pas une ?uvre chorégraphique : tout au plus un joli zapping dont j'aurais perdu la télécommande.
Pascal Bély
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